Plus que jamais, mettre l’humain et ses valeurs au centre des entreprises est devenu crucial. Le confinement nous a conduits à repenser notre manière d’appréhender le travail. Si certains encore, il y a peu de temps apparaissaient comme des utopistes, aujourd’hui leur expérience nous permet de trouver des antidotes à la souffrance au travail. Relier son comportement seulement avec pour horizon la croissance de l’entreprise donne aujourd’hui les résultats déplorables des burn out et du mal de vivre des dirigeants et des salariés. En effet, ils sont liés par ce contrat économique. Or, a contrario si la finalité humaniste prend actuellement la place qui lui est due, toute action prend du sens et est illuminée par cette conception. Constat en est fait que dans nombre d’entreprises qui choisissent de mettre au centre de leur organisation les valeurs humanistes, entraînent en contrepartie l’innovation et la performance.
Jacques Lecomte, docteur en psychologie et président d’honneur de l’Association française de Psychologie positive, dans son ouvrage remarquable, « Les entreprises humanistes » paru début 2016, met en exergue le fait que le sens et la performance peuvent réaliser un binôme gagnant. Il s’appuie sur l’exemple d’Hubert de Boisredon, PDG de l’entreprise Armor qui a placé l’innovation sociétale au cœur de son entreprise pour l’extraire des difficultés dans lesquelles elle était condamnée à licencier pour réaliser l’inverse, c’est-à-dire l’innovation et la performance. Ainsi, il souligne lors d’une conférence : « Quand on est bien dans l’entreprise, quand on en perçoit le sens, on a envie de s’y donner pleinement, il y a un élan qui se traduit dans le service aux clients et donc dans les résultats de l’entreprise. »
Pourquoi une approche humaniste est-elle source de performance ?
Il existe des évidences actuelles dues à la transformation de la société. Les comportements d’hier liés à une organisation pyramidale étaient construits sur un modèle hiérarchique qui entraînait des valeurs dirigées grâce à la notion du devoir vers la réussite économique. Or le salarié, l’entreprise et les relations extérieures (client, fournisseurs, prestataires…) sont liés de manière indissociable. En fait, ce changement de paradigme change l’axe des entreprises et la raison d’être de l’entreprise, les produits ou les services, les conditions de travail des salariés, les conditions relationnelles c’est-à-dire le management fondé sur le respect, la confiance, la revalorisation, la bienveillance et les clients et consommateurs, qui forment un tout. De plus, dissocier l’environnement de l’entreprise c’est conduire la planète à devenir une planète de déchets avec les conséquences qu’ils induisent. Le développement durable doit donc faire partie des priorités de l’entreprise.
Cette vision des valeurs humanistes peut paraître bien décalée par rapport à la réalité d’une économie et des conditions souvent dégradées, mais plutôt que chercher ce qui ne va pas, pourquoi les actions et le comportement de chaque membre de l’entreprise ne pourraient pas redonner du sens à chaque moment de la vie. Selon Jacques Lecomte « la psychologie positive commence à s’intéresser à ce qui va bien chez l’individu et à étudier le sens de la vie, le bonheur, la motivation, l’optimisme, autant d’éléments essentiels pour le monde du travail. »
Constater l’impact positif de son travail, une source essentielle de la motivation
La motivation intrinsèque est de trouver de l’intérêt dans l’action en elle-même et génère satisfaction et le sentiment du travail bien fait. La motivation extrinsèque est de trouver de l’intérêt dans le résultat obtenu à la suite de l’action comme la satisfaction des membres de l’équipe mais aussi des responsables, du client, des partenaires…. Et donc l’altruisme qui fait partie de la motivation au travail. Ainsi, les travaux d’Adam Grant, professeur à l’université de Pennsylvanie, mettent en exergue l’impact positif sur un salarié d’avoir conscience que son travail sert les besoins d’autrui. « Le sentiment d’être utile incite à faire son travail le mieux possible. Cette « motivation de service public », le désir d’être professionnellement utile aux autres, est une composante majeure de l’engagement des salariés ».
Le pouvoir de la coopération, un maillon du bien-être en entreprise
Si une entreprise instaure la compétition entre ses salariés, elle génère mal-être et augmentation de la méfiance et du dénigrement l’entreprise, des autres et de soi-même. Dean Tjosvold, professeur à l’université de Lingnan à Hong Kong a centré ses recherches sur la coopération dans les organisations et a réalisé des enquêtes dans des entreprises très différentes dans le monde et en a extrait trois types d’interaction entre des individus : la coopération (l’atteinte de mes objectifs dépend de celle de ceux des autres), la compétition (l’atteinte de mes objectifs se fait au détriment d’autrui) ou l’indépendance (mon succès n’a pas d’impact sur celui des autres).
Or il apparaît que dans les recherches et quelle que soit l’entreprise étudiée, les résultats sont similaires : « Dans une atmosphère de coopération, les collègues peuvent exprimer ouvertement des opinions divergentes, en vue de résoudre un problème, sans que cela génère du ressentiment. En revanche, en situation de compétition, les gens ont tendance à rejeter les suggestions d’autrui, à prendre des décisions unilatéralement. Les personnes fonctionnant de manière coopérative ont tendance à parler ouvertement des erreurs faites et en tirent une source d’apprentissage pour le futur. Inversement, dans un contexte compétitif, reconnaître une erreur est dangereux, car cela risque fort d’être interprété comme une marque d’incompétence, ce qui limite les possibilités d’apprentissage organisationnel. »
Ces valeurs humanistes, elles apparaissent sans cesse dans les interviews des dirigeants et font que le magazine Dynamique Entrepreneuriale a une vision optimiste des entreprises et de leurs dirigeants et elles sont la pierre angulaire d’un monde d’espoir.