Une tendance s’affirme depuis plusieurs années dans l’univers touristique, celui du tourisme industriel. Des sociétés n’hésitent plus à ouvrir leurs portes afin de faire découvrir au grand public, leur savoir-faire et leur patrimoine. Une pratique de plus en plus appréciée par les touristes, à la recherche d’expériences atypiques et authentiques. D’un autre côté, elle permet à une entreprise de développer sa notoriété tout en générant du chiffre d’affaires. Zoom sur le phénomène.
Dans l’Hexagone, le tourisme industriel continue de séduire les Français comme les étrangers. En 2012, ils étaient dix millions à avoir visité une entreprise et, en 2014, treize millions, avec plus d’un million de voyageurs venant d’autres pays. Aujourd’hui, pas moins de 5 000 sociétés ouvrent leurs portes dans le cadre de visites. Les secteurs d’activité les plus affectionnés restent l’agroalimentaire et la production d’alcool (60 %), l’artisanat (18 %) ainsi que l’environnement et l’énergie (10 %), selon l’Observatoire de la visite d’entreprise (organisme analysant la répartition des entreprises par secteur d’activité, leur taille et le nombre de visiteurs, ndlr). Quant au domaine de la mode, des cosmétiques et des technologies, ils séduisent respectivement 7 % et 5 % des touristes. Cette tendance apporte de nombreux avantages aux entrepreneurs ainsi qu’à leur établissement. Des plateformes se mettent également en place pour faciliter les rencontres entre firmes et grand public.
Un atout pour les entreprises
Si le tourisme industriel constitue un vecteur d’enrichissement culturel pour les visiteurs, les entreprises sont, elles aussi, gagnantes. Pour ces dernières, cette pratique représente un élément considérable en tant que base de création d’emplois mais aussi par ses retombées en termes d’image et de ventes. Les visites permettent aux sociétés de communiquer directement avec le public, qu’il fasse partie d’une population jeune ou plus âgée. Les personnes peuvent observer et échanger avec les salariés sur leur lieu de travail, mais également découvrir de nouveaux métiers, favorisant la rencontre avec de potentiels futurs employés. Cela permet aussi de souligner la qualité des produits/services et du savoir-faire d’une entreprise, tout en révélant certains aspects peu connus de la population comme la traçabilité, les conditions d’activité ou la gestion de l’environnement.
Le tourisme industriel se place, par ailleurs, comme un instrument de développement économique par le biais des recettes obtenues à l’occasion de la visite, payante, et par la mise en place d’un espace de vente. Les achats consécutifs à une excursion sont d’ailleurs plus de deux fois supérieurs à ceux effectués hors visite, selon l’Observatoire de la visite d’entreprise. D’après la même source, 78 % des sociétés participantes disposent d’une boutique et 58 % font payer un ticket d’entrée. Par exemple, La Maison d’Armorine, société bretonne de confiseries sucrées, organise toute l’année des rencontres pour faire découvrir l’intérieur de l’atelier de fabrication et les pâtissiers durant leur travail. Elle reçoit plus de 30 000 personnes par an, ce qui rehausse ses ventes à 7,5 millions d’euros de chiffre d’affaires. Le site de fabrication de Kindy, firme de production et distribution de chaussettes, menacée de fermer ses portes en 2017, s’est lancé, cette année, dans le tourisme industriel dans le but de doubler sa production et montrer sa renaissance.
Des plateformes spécialisées dans les visites
Des sites en ligne ont vu le jour pour mettre en valeur le tourisme industriel et les sociétés françaises. C’est notamment le cas de Entreprise et Découverte et de WeSavoirFaire.
Le premier site a été lancé en 2012 par l’AVE (Association de la visite d’entreprise, ndlr) avec le soutien financier de l’État. Son objectif reste de valoriser et de promouvoir la filière de la visite d’entreprise. La confédération poursuit alors trois missions. Elle cherche à fédérer les firmes, les institutions et les professionnels du tourisme chaque année lors de l’événement « Les Rencontres Nationales de la Visite d’Entreprise ». Elle s’occupe également de gérer les relations presse sur la filière et d’accompagner les sociétés et les territoires afin d’élaborer des parcours et des opérations de visites personnalisés. L’association compte, aujourd’hui, 400 adhérents, constitués à 80 % d’entreprises et à 20 % d’organismes touristiques. Depuis sa création, près de 2 000 firmes partenaires ont été assistées dans l’élaboration de leurs visites afin d’ouvrir leurs portes au public. L’agroalimentaire et l’alcool demeurent les secteurs plus représentés, mais l’univers artisanal et celui technologique, y figurent aussi. Grâce à la plateforme, les entreprises disposent d’une réelle visibilité. Pour y adhérer, trois offres sont proposées selon la taille de la société, comme la « Classique » à partir de 62 euros, qui permet d’afficher sa visite sur le site et d’être mis en relation avec d’autres firmes. Des versions « Premium » à partir de 198 et 310 euros offrent, elles, une visibilité privilégiée ainsi qu’une communication renforcée. Quant à la start-up We Savoir Faire, elle a lancé sa plateforme en 2013 pour favoriser le contact entre les entreprises et les touristes. Les visiteurs peuvent naviguer sur des pages dédiées aux sociétés partenaires, qui comportent une galerie photo, des informations sur les activités ainsi qu’un calendrier de visites. Les réservations s’effectuent ensuite directement sur le site.
La France n’est pas le seul pays concerné par le tourisme industriel. Le Japon, avec JETRO (Japan External Trade Organization, organisation japonaise chargée de mettre en valeur le commerce extérieur, ndlr) fait la promotion des savoir-faire des sociétés du pays centrées notamment dans l’artisanat traditionnel et l’industrie technologique. Quant à la Chine, elle a décidé d’encourager le développement du secteur en novembre 2017 en construisant cent bases et en désignant vingt entreprises spécialisées dans la production d’alcool, de produits laitiers ou encore de cosmétiques comme lieux de visites au niveau national. Son objectif est d’attirer 240 millions de visiteurs par an et d’obtenir plus de 4,5 milliards de dollars pour 2020. Des agences de voyages et des guides vont même plus loin avec le tourisme noir (forme controversée de tourisme qui consiste à visiter des lieux étroitement liés à la mort, à la souffrance ou à des catastrophes, ndlr) en proposant, par exemple, des visites de la centrale nucléaire de Tchernobyl en Ukraine, qui a subi un accident majeur en avril 1986.