Internet regorge de centaines d’applications et services à tout faire pour la gestion des entreprises. Deux grandes questions se posent généralement quand on parle de système d’information (SI) : devez-vous laisser vos collaborateurs – et vous-même – libres de choisir les outils de leur choix et de la manière qui leur convient ? Une telle liberté est-elle compatible avec les impératifs de cohérence et de protection des données de l’entreprise ?
Un exemple de dysfonctionnement
Il arrive parfois qu’un expert-comptable et un entrepreneur qui confrontent leurs chiffres sur le chiffre des ventes de la période ou sur les sommes dues par les clients ne tombent pas d’accord. Évidemment, chacun prend les données issues de son propre système pour exactes : logiciel de comptabilité pour l’un, base de données de gestion commerciale pour l’autre. Dans ce cas, au final, c’est généralement simple. On peut se dire que la comptabilité est normalisée et la gestion commerciale pas toujours et que la comptabilité finira par faire loi mais parfois il s’agit juste d’un oubli d’imputation d’une facture qui peut fausser la donne. Surtout, les choses ne sont pas toujours aussi simples.
La confiance n’exclut pas le contrôle
On trouve de vraies pépites parmi les applications qui permettent la gestion comptable ou commerciale, voire le reporting de l’entreprise. C’est génial : il n’y a plus d’excuse possible pour justifier quelque manque de suivi que ce soit dans votre boîte, puisqu’on trouve un outil pour tout. Les esprits les plus indépendants développeront même, sans se ruiner, un système d’information interne.
De la facturation à la tenue comptable, du suivi des stocks à la gestion du reporting et du « pipe-line », tout est à la portée de toutes les bourses. Chaque médaille ayant son revers, il convient d’éviter certains pièges. Pour une gestion crédible, mieux vaut ne pas essayer de réinventer la roue. Baser une stratégie sur des chiffres approximatifs, c’est rater des opportunités de développement ou au contraire, ne pas anticiper des difficultés.
Attention au réflexe « Tirer la couverture à soi »
Laisser tout le monde utiliser les applications qui plaisent est une tentation logique, puisque justement, chacun est un spécialiste de son poste. Méfiance : ce n’est pas parce qu’un outil dit «de travail collaboratif » met des données à disposition de ceux qui se les partagent, que celles-ci sont pertinentes, à jour, et compréhensibles. Un minimum de réflexion et de procédures collectives s’impose pour éviter le désordre, chaque utilisateur étant naturellement tenté de ne tenir à jour que les informations dont il a lui-même besoin.
L’élaboration d’un SI
D’abord, il convient de faire la part des choses entre les gadgets et les services aboutis, fiables, sécurisés et évolutifs. C’est une difficulté : savoir qu’on a besoin d’un outil de suivi est une chose, mais c’est souvent l’usage qui permet de vérifier que l’appli choisie répond à notre besoin… ou pas.
Au-delà d’une interface sympa et d’un prix attractif, il est essentiel de vérifier la cohérence des données et l’ergonomie du progiciel et d’essayer de réunir des compétences transversales pour répondre aux questions suivantes : l’intégration des données et les rapports de synthèse produits (imputs et outputs) par le logiciel répondent-ils aux besoins globaux de l’entreprise ? Toutes les personnes intéressées sauront-elles exploiter efficacement ce système d’information, pour faire leur job ? Comment va-t-on s’y prendre pour exercer un contrôle continu de l’exactitude des chiffres établis à l’aide de l’application et de la sécurité des données ? Qui va assumer la responsabilité du contrôle interne ?
Pour reprendre l’exemple de divergence de chiffres de ventes entre le comptable et le service facturation, l’entreprise aurait pu réunir en amont de l’élaboration du SI, les comptables et l’administration des ventes, et mettre en place d’office une procédure permanente d’analyse et de correction des écarts entre les chiffres issus de sa gestion commerciale avec ceux du logiciel de comptabilité.
Une base de données unique, c’est tellement mieux
La gestion de l’entreprise, le contrôle interne et la justesse du reporting est toujours facilitée lorsqu’une base de données unique est exploitée et sécurisée par une personne responsable, qui a une vision transversale des besoins des différentes fonctions de l’entreprise.
Une vision stratégique à long terme devrait vous inciter à tendre vers cet objectif. Naturellement, une telle mise en place demande un investissement, surtout en temps. Il va falloir des palabres, pour construire la base de données qui va bien mais l’enjeu peut en valoir la chandelle tant le gain de temps peut être conséquent sur le long terme.
Disciplinez votre esprit créatif : la gestion est affaire de « standards »
En matière de chiffres, l’originalité ne paie pas. Il reste généralement préconisé d’adopter des logiciels, largement diffusés dans un grand nombre d’entreprises. Les logiciels « maison », dans les petites entreprises, se développent souvent dans l’urgence, sans cahier des charges global. Leur interface « utilisateurs » et la production des « outputs » est parfois souvent médiocre et les contrôles de cohérence des données inexistants. Avec un outil informatique artisanal et peu documenté, vous compliquez la tâche de l’aide extérieure dont vous aurez tôt ou tard besoin. Les experts-comptables, conseils de tous ordres et formateurs n’apprécient pas de devoir faire le ménage chez vous, avant de pouvoir vous faire vraiment bénéficier de leurs compétences.
Enfin et surtout, un système d’information fiable renforce la crédibilité de l’entreprise auprès de ses clients, de ses fournisseurs et de ses banquiers ou actionnaires. Rien de tel que des renseignements toujours précis et délivrés à bon escient pour renvoyer durablement une image professionnelle. Nous vivons dans un monde de service où le meilleur professionnel peut être surclassé par un concurrent moins doué que lui, mais mieux organisé.
Les lacunes dans la gestion sont à l’origine de très nombreuses faillites d’entreprises. Sans envisager le pire, faute de réflexion sur la mise en place d’un système d’information professionnel, on perdra un jour ou l’autre du temps et parfois ses nerfs, quand il faut commencer à gérer l’entreprise « au cordeau », tant pour maîtriser la croissance que s’il faut vivre en tension de trésorerie.