Peut-être l’avez-vous remarqué, les start-up françaises présentent une certaine tendance à se vendre au plus offrant. Alors que dans d’autres pays, cette pratique semble rejetée, la France voit ses lucioles partir à l’étranger pour ne jamais en revenir. Pourquoi les Français vendent-ils si facilement aux étrangers ?
La France, cette fabrique à start-up
Environ 10 000 jeunes pousses ont vu le jour dans l’Hexagone au cours des cinq dernières années. Le pays serait donc une véritable usine à start-up qui sait encourager les entrepreneurs. Avec de grandes écoles, telles que Polytechnique, qui mettent des aides à disposition des projets innovants et des fonds d’investissements aux capacités immenses, la France présente plusieurs arguments affûtés pour convaincre les startuppers de se lancer. Les sources de financement s’avèrent, en effet, nombreuses pour les entrepreneurs du pays : le crowdfunding, les business angels, ainsi que des structures comme Bpifrance, qui comptent d’importantes réserves financières dédiées aux jeunes projets. Beaucoup de grands groupes se chargent aussi d’encourager les start-up, de peur de devenir obsolètes face aux nouvelles technologies disruptives. Ces grandes firmes développent de plus en plus de programmes d’accompagnement destinés aux lucioles. Ces contrats leur permettent également de construire des partenariats avec ces dernières afin de rester « dans le coup ».
L’enthousiasme de la France pour les nouvelles technologies contribue aussi fortement à cette intense apparition de start-up. Les secteurs de la medtech, secteur des technologies médicales, fintech, concernant celui de la finance, greentech, technologies en matière d’environnement ou encore de la biotech, domaine des biotechnologies, connaissent une grande croissance dans le pays. Pour aider les entreprises naissantes à se développer jusqu’au bout, les villes et communautés mettent en place des dispositifs particuliers comme des espaces de coworking, des fablabs (lieux ouverts au public mettant à disposition de chacun plusieurs ordinateurs et machines, ndlr), des accélérateurs ou des incubateurs.
L’Hexagone comme piste de lancement des start-up… vers d’autres horizons
Malgré tous ces efforts déployés pour accueillir les start-up, on observe un phénomène récurrent. Les plus brillantes d’entre elles persistent à se vendre à l’étranger. Les lucioles françaises les plus prometteuses tombent toutes aux mains de groupes internationaux, les unes après les autres. L’une des explications réside dans le manque de moyens mis à disposition des jeunes pousses une fois leur installation terminée. D’après Bertin Nahum, fondateur de MedTech, une société de robotique chirurgicale rachetée par l’américain Zimmer Biomet, ces firmes ne bénéficient pas d’un suivi adapté. Elles ne trouvent, en France, ni les analystes spécialisés, ni les grands fonds d’investissements, ni les grands partenaires industriels dont elles auraient besoin pour attaquer les importants marchés internationaux tout en restant indépendantes. S’exporter outre-Atlantique déboucherait aussi sur une valorisation, pour une jeune start-up française, cinq à dix fois supérieure à celle d’une entreprise américaine. Une démarche qui plutôt alléchante ! L’Hexagone constituerait ainsi une parfaite piste de lancement mais ne donnerait pas les moyens de décoller…
Ces jeunes pousses à succès revendues à des étrangers
Tous les secteurs sont touchés par ce phénomène et de nombreux exemples l’illustrent. Le site de rencontres Meetic appartient désormais à l’américain Match.com, le site de petites annonces PriceMinister s’est vu racheté par le japonais Rakuten et l’Allemand Axel Springer a acquis les sites d’immobilier et de presse féminine Seloger et Auféminin. D’un autre côté, Leboncoin.fr, leader français des petites annonces a été cédé au norvégien Shibsted, tandis que le site de marketing Neolane fait aujourd’hui partie du géant américain Adobe. Captain Train, le vendeur de tickets en ligne a été repris par son concurrent Britannique Trainline. Les start-up des nouvelles technologies se voient également rachetées : Aldebaran, inventeur des robots humanoïdes Pepper et Nao, appartient maintenant au japonais Softbank. Quant à Withings, précurseur tricolore des objets connectés, il fait désormais partie du groupe norvégien Nokia.
Pour d’autres exemples de start-up française en voici une liste exhaustive : Allo Resto rachetée par Just Eat, Sticky ads TV rachetée par Comcast, Teads rachetée par Altice, Zeensoon (devenue Treatwell) rachetée par Wahanda. Et on pourrait encore en citer !
Le cas de l’Allemagne : un contre-exemple
Nos voisins allemands se trouvent dans la situation opposée. Les start-up de ce pays ne cèdent pratiquement pas aux étrangers et ce, pour une bonne raison : elles comptent sur eux pour venir entreprendre dans leur pays ! Les Allemands n’auraient pas spécialement la fibre entrepreneuriale et la majorité des jeunes pousses nées outre-Rhin seraient en réalité fondées par des personnes venues d’autres nations. Une stratégie qui semble fonctionner car, en 2015, on recensait 44% des entreprises allemandes créées par des étrangers. Cela représente près d’un tiers des entrepreneurs sur le sol allemand. Si celui-ci reste une terre d’accueil, l’activité entrepreneuriale y resterait assez peu développée. La mentalité locale ne se porte tout simplement pas sur cette voie professionnelle et beaucoup d’immigrés monteraient leur affaire faute d’autres options professionnelles satisfaisantes.
Quelques business insolites interdits en France
La manie des start-up françaises reste de se vendre au plus offrant, ce qui déplaît beaucoup à certains. La réglementation en vigueur freine, voire interdit, tout de même certains domaines dans lesquels d’autres start-up cartonnent à travers le monde. A titre d’exemple, la WeedTech, technologie dédiée au cannabis, demeure prohibée dans l’Hexagone. Légale dans 25 Etats des États-Unis, cette herbe représente le nouvel or vert de nombreuses jeunes pousses américaines. Ce marché constitue l’un des plus rentables outre-Atlantique et serait estimé à 22 milliards de dollars en 2020. Autre filière interdite en France : la conservation de cordons ombilicaux… Business en pleine expansion en Belgique, cette activité reste maintenue hors de nos frontières.