Nicolas Cargou, co-fondateur de SamBoat, nous confie les secrets qui lui ont permis de faire décoller son site internet qui domine le marché de la navigation. L’entreprise vous propose de louer tous types de bateaux (voiliers, catamarans, péniches, yachts de luxe et plus petits, …).
Comment vous est venue l’idée de SamBoat ?
L’idée de Samboat m’est venue en 2013 lorsque j’ai rencontré mon associé Laurent Calando. À l’époque, nous travaillions tous les deux chez Total. Je venais juste de terminer mes études à Novancia et j’étais un fervent utilisateur d’Airbnb. A ce moment-là, je me suis dit : « C’est complètement fou cette économie collaborative : on remet, au centre de l’économie, l’utilisateur final ! » Laurent avait toujours fait du bateau, il connaissait bien le secteur. Je lui ai fait découvrir Airbnb et lui m’a fait découvrir le monde du nautisme. On s’est vite rendu compte que l’économie collaborative couvrait beaucoup de marchés mais pas celui du bateau ni des deux roues motorisées. Cela confirmait complètement ma vision et l’opportunité de ce marché. Voilà la genèse de l’aventure.
Vous veniez de sortir de l’école donc ?
Quand nous sommes sortis de l’école, nous ne connaissions pas grand-chose à la vie professionnelle, malgré des années d’expérience en alternance et une année en CDD. Avec l’entrepreneuriat, nous nous sommes jetés dans le grand bain. C’est devenu une vraie entreprise grâce à l’association de nos deux passions, le nautisme et l’économie collaborative, l’ADN de notre développement.
Quelles ont été les étapes suivantes ?
Nous avons levé des fonds en 2015 pour pouvoir confirmer l’attraction du marché.
Dès 2015, un assureur a été très intéressé par notre entreprise et nous a proposé d’intégrer au contrat un produit d’assurance pour protéger aussi bien le locataire que le propriétaire. Cette excellente collaboration nous a permis en 2016 via son fonds d’investissement de réaliser notre première levée de fonds d’un million d’euros pour partir à la conquête de l’Europe dans un premier temps.
Parallèlement, nous avons commencé à nous ouvrir au marché de la location de bateaux, c’est-à-dire à intégrer de nombreuses flottes de petits loueurs pros et de gros charters. C’est comme cela que nous avons commencé à collaborer avec Dream Yacht Worldwide qui, finalement, deux ans après, nous a rachetés. Samboat a apporté à Dream Yacht son expertise au niveau de la plateforme digitale ainsi qu’un nouveau marché qui est celui de la location à la journée sur du bateau moteur.
Le site internet de Samboat, qui nous avait permis de faire un POC (Proof of concept, preuve du concept en français, ndlr), a été maintenu pendant quasiment plus de deux ans jusqu’en 2016, et la refonte de la nouvelle plateforme a vu le jour en 2018, essentielle pour permettre une scalabilité du concept. C’est à partir de ce moment-là que Samboat est devenue une startup tech en s’entourant des meilleurs !
Quelles sont les grandes activités aujourd’hui de SamBoat ?
Aujourd’hui, nous sommes seulement deux plateformes dans le monde à couvrir tous les types de locations à travers 2 marchés :
- Le marché du dayboat (location à la journée plutôt axée sur des petites unités inférieures à 8m et types bateaux moteurs)
- Le marché du charter (location “overnight” : ’il est possible de passer des nuits à bord car il y a une cabine). Ce sont principalement des catamarans et des voiliers et la plupart du temps des locations à la semaine.
Ces deux marchés ont deux approches complètement différentes, mais à terme, nous voudrions les uniformiser. Le dayboat repose quasiment sur de l’instantanéité, avec des réservations « full online » alors que le charter nécessite une meilleure anticipation. En effet celui-ci permet d’organiser des croisières avec famille ou amis et nécessite de répondre aux demandes, établir des devis, les comparer, etc. Cela prend plusieurs jours ou plusieurs semaines avant qu’un client se décide. Cela nécessite donc un réel accompagnement et une expertise de nos conseillers croisières.
« Le site internet de Samboat, qui nous avait permis de faire un POC (Proof of concept, preuve du concept en français, ndlr), a été maintenu pendant quasiment plus de deux ans jusqu’en 2016. »
Nicolas Cargou, co-fondateur de SamBoat
De 2018 à aujourd’hui, que s’est-il passé ?
A la suite du rachat, nous nous sommes concentrés sur la collaboration avec Dream Yacht qui couvre une grande partie des bateaux charters dans le monde, soit 1 000 bateaux charters en propre exploités sur des bases dans les ports. Globalement, nous essayons depuis de créer des synergies sur tous les marchés et Dream Yacht Worldwide nous facilite le travail quand nous devons développer de nouveaux marchés comme les États-Unis ou plus récemment avec l’Allemagne.
Nous avons officialisé l’intégration d’Argos début février pendant le salon international nautique le plus important d’Europe : le « Boot de Düsseldorf ». Comme à chaque fois, cette fusion va se faire en deux étapes : la consolidation des process et des équipes notamment et ensuite la croissance.
La phase de consolidation, représente l’intégration de toutes les entités rachetées par Dream Yacht. Celles-ci sont des agences traditionnelles de location de bateaux. Les intégrer à SamBoat permet de leur faire profiter de notre expertise sur la digitalisation et nos outils de gagner en efficience en diminuant par 5 le temps de traitement d’un client.
Nous avons déjà réalisé avec succès deux intégrations dans le passé avec Vents de mer, société qui était basée en Bretagne, et LateSail qui était basée près de Londres, en Grande-Bretagne. Des consolidations réussies et nous en sommes fiers. Les collaborateurs de ces agences et la brandawareness des marques ont pu apporter à SamBoat l’expertise dans le domaine charter et la légitimité sur le marché local.
Nous espérons, avec l’arrivée d’Argos, gagner en parts de marché et faire connaître Samboat sur l’un de nos marchés clés qui est l’Allemagne.
Par rapport à votre site internet, comment avez vous réussi à vous faire connaître ?
Nous avons commencé avec 2 000 € chacun et un prêt de création d’entreprise de 21 000 €, cela nous a permis de créer le site SamBoat, le faire connaître et développer le POC. À cette époque, nous nous considérions comme « des ninjas de la débrouille » tels des Growth hackers, surtout au niveau de la communication. Nous sommes arrivés au bon moment, en « time to market », ce qui signifie que le sujet de l’économie collaborative avait le vent en poupe.
Un des enjeux a été de convaincre et de rassurer les ports car certains voulaient interdire notre application, notamment là où nous avons commencé c’est-à-dire sur le bassin d’Arcachon.
Une fois que nous avons attiré l’œil des investisseurs sur notre concept, nous avons pu mieux structurer notre démarche d’acquisition, principalement via AdWords et les relations médias. Nous avons travaillé le référencement naturel pour faire face à la concurrence et notre stratégie de content.
La difficulté a été et est toujours de s’adapter face aux changements de règles du géant Google qui peut du jour au lendemain modifier son algorithme de référencement.
Qu’est-ce que Vous entendez par stratégie de content ?
Nous avons un blog qui est aujourd’hui en cinq langues. Nous écrivons et échangeons sur tous les sujets autour du bateau, les itinéraires, les loisirs, les activités, les plus belles croisières, les plus beaux espaces, les plus belles plages, etc. Il y a de nombreuses destinations, donc nous ne manquons pas de sujets. Pour créer de la fidélité, il faut apporter du contenu de qualité. Nous utilisons notamment une stratégie SEO pour le maillage et des landing page. Je rêve que demain on puisse se dire : « Allez, on va SamBoater ! ». Airbnb a réussi à créer cet esprit et nous aimerions le faire à notre échelle.
Comment avez-vous développé votre site ?
Nous avons commencé avec une simple landing page pour participer à un concours (101 projets) puis nous avons obtenu un prêt à la création d’entreprise de 21 000 € nous permettant de faire vivre la société et de créer la V1 du site (le POC : Proof of Concept) avec une connaissance rencontrée pendant mes années d’alternance. C’était une version Alpha de Bêta très buguée au début mais nous n’avions pas beaucoup de moyens à l’époque. Anecdote assez drôle pour une plateforme digitale que d’avoir accepté la première location avec un paiement par chèque, c’était en février 2014. Ce POC a duré un an et demi puis nous avons internalisé les compétences fin 2015, ce qui nous a permis de définitivement nous projeter sur la croissance.
Vous me disiez qu’il y avait eu un important travail sur la base de données ?
Oui, nous avons fait clairement un switch on – switch off. Il y a eu une version A et B. Nous étions sur un framework PHP CodeIgniter plutôt pour les d’étudiants et là, nous sommes passés sur Laravel, qui est très connue, toujours en PHP, sauf que nous avons refondu toute la base de données et l’infrastructure du site afin qu’il soit scalable à l’infini et qu’on puisse déployer simplement à l’international.
Le référencement naturel est arrivé quand ? Et comment gérer l’innovation ?
Le SEO est le nerf de la guerre, nous y travaillons depuis 2015 mais c’était plutôt en amateur au début (et surtout un gros problème sur la façon dont avait été conçue la V1 du site). Aujourd’hui, nous nous considérons davantage comme une startup IT qu’une société de tourisme à vrai dire, et la stratégie SEO est maîtrisée tout en analysant où se positionne toute la concurrence. Côté innovation, nous n’avons jamais cessé de voir loin et d’être en avance sur la concurrence, nous avons été les premiers à avoir un contrat dématérialisé sur smartphone par exemple.
Et cela ne s’arrête pas là, en 2017, nous avons créé notre propre outil SAAS à disposition des professionnels qu’on appelle GDS “ Global Distribution System ”. Cet outil permet aux professionnels d’être visibles sur internet et de faciliter la gestion de leur locations (il faut savoir qu’une grande majorité gère leurs locations sur un bout de papier comme à l’ancienne).
Nous leur permettons de se digitaliser avec nous. Le plus grand challenge dans ce business est de maîtriser l’offre et la disponibilité. Avec la création de la marque Nautic Manager nous avons pu répondre aux problématiques de temps et de taux de réponses des propriétaires. Il faut avoir une bonne maîtrise de ces éléments sinon les clients sont déçus et cette déception peut avoir des répercussions sur notre image de marque. C’est pourquoi nous avons décidé de racheter en décembre dernier notre concurrent direct Digital Nautic sur le marché du SAAS afin d’étendre notre emprise partout en Europe, sur le marché Dayboat.
Vos équipes principalement composées de développeurs ?
C’est une équipe de 12 personnes avec des métiers variés : nous avons un CTO, des fullstack, une personne en charge de l’application, un CPO et des product owners pour toute la partie recettage et produit. Nous avons des profils qui collent à nos attentes et beaucoup de seniors expérimentés ce qui est une clé pour la croissance.
Quels sont les défis à venir ?
Notre ambition est d’atteindre 100 millions de chiffre d’affaires d’ici 2024. En 2022, nous avons fait 70 % de croissance et notre objectif est de connaître le même ratio de croissance sur les deux prochaines années.
Quelles sont les clés pour réussir sur Internet ?
Tout part de sa propre volonté, l’autoformation et l’envie d’apprendre sont essentielles. Il faut bien sûr être passionné par le web et au moins par le marketing avec un fort penchant pour la data. Au fur et à mesure des années, j’ai fait évoluer mon profil. Initialement, je suis sorti d’une école de commerce avec un background web. La première saison j’étais au marketing et à la communication mais aussi aux opérations. On est un couteau suisse quand on commence.
Je me suis ensuite vite spécialisé dans l’analyse de données et dans l’amélioration et/ou création de tous les process de la société afin d’automatiser le maximum de choses. Notre but d’une saison à l’autre n’est pas de compenser la croissance par du recrutement mais d’adapter les process, de nouveaux outils pour qu’un ETP puisse faire plus avec moins de charges mentales. L’autre clé du succès reste la qualité des profils, surtout sur l’IT. L’après Covid a été compliqué pour le recrutement car il y avait une pénurie des profils tech.
Des éléments business qui t’ont surpris ?
Depuis quelques années nous nous sommes rendu compte que les locations se faisaient de plus en plus avec skippers car les vacanciers veulent se faire plaisir sans avoir la responsabilité du bateau. Et surtout, nous observons une nouvelle catégorie de clients qui veulent découvrir le nautisme, et faire appel à un skipper est la meilleure solution.
« Aujourd’hui, nous nous considérons davantage comme une startup IT qu’une société de tourisme à vrai dire, et la stratégie SEO est maîtrisée tout en analysant où se positionne toute la concurrence. »
Nicolas Cargou, co-fondateur de SamBoat