Interview de Quentin Vacher, Cofondateur de JolieBox

Entretien exclusif avec Quentin Vacher, cofondateur de JolieBox, société rachetée par le grand groupe américain BirchBox qui propose des produits de beauté par abonnement. 

Quel a été votre parcours jusqu’à la création de JolieBox ?

J’ai fait des études dans le domaine de la finance à l’Université Paris Dauphine puis je me suis expatrié à Londres, où j’ai intégré la London School of Economics. Par la suite, j’ai eu l’opportunité de travailler dans le département fusion-acquisition de la prestigieuse banque américaine, Morgan Stanley. Mon désir d’entreprendre et de prendre des risques a précipité mon départ. Je concevais difficilement d’être qu’un salarié parmi d’autres. Cette philosophie du travail, mes parents me l’ont sans doute transmise, étant eux-mêmes entrepreneurs.

De l’idée jusqu’au lancement de JolieBox, quelles ont été les étapes phares ?

L’idée nous est venue indirectement. Mathilde Lacombe, l’une de mes cofondatrices, était bloggeuse beauté. Nous avions fait le constat très simple que ce secteur est très communautaire. De nombreuses femmes se renseignent sur la toile et pourtant très peu de transactions se réalisent. Voyant ce qui se faisait aux états-Unis, nous avons décidé de pallier un manque : celui de pouvoir de tester le produit. En juin 2011 naît donc JolieBox, ce que nous considérions être un bon compromis par rapport à BirchBox. Le lancement a connu un réel engouement grâce aux 50 femmes qui ont, chacune, reçu une box afin de se faire une idée du concept. Au vu des élogieux retours dont nous avons profité, les abonnements ont été lancés dès le mois suivant. Ces derniers ont également rencontré un franc succès comme en attestent les 250 ventes en une heure seulement. Le besoin d’effectuer une levée de fonds s’est rapidement imposé à nous. Nous avons fait appel à Alven Capital qui a débloqué 1 million d’euros en trois semaines seulement.

Comment s’est déroulé votre développement à l’international ?

L’internationalisation faisait partie de nos objectifs à court terme, par souci pour la marque. Dès décembre, nous avons fait l’acquisition d’une société anglaise puis en février, celle d’une société espagnole. Progressivement, un rapprochement a naturellement eu lieu avec BirchBox, leader incontestable américain. Celui-ci s’est officialisé en septembre 2012, nous permettant ainsi d’associer nos forces. Cette union a donné lieu à un immense partage de cultures.

N’avez-vous pas eu peur de perdre votre liberté en vous faisant racheter par BirchBox ?

J’ai la chance de travailler avec des gens très intelligents en Amérique, avec lesquels l’osmose est totale et qui n’éprouvent, du coup, pas le besoin de me retirer une quelconque liberté. Qui plus est, nous sommes une société où les collaborateurs sont eux-mêmes entrepreneurs. Ceux qui souhaitent lancer des initiatives ne sont jamais refreinés. Et, pour ma part, j’ai énormément d’éléments visant à satisfaire mon appétit. En effet, nous avons de grands projets de développement et de croissance.

Vous avez très rapidement connu une croissance folle, comment avez-vous fait pour la gérer ?

Tout d’abord, nous avons clairement défini quel était l’esprit. Un développement rapide représente beaucoup de travail et de difficultés au quotidien. Il faut restreindre ses décisions à des choses simples. La communication interne est très poussée. Nous avons instauré une hiérarchie malléable, de sorte que l’ensemble des employés puisse prendre des décisions. Je pense que notre force est de savoir nous entourer de personnes talentueuses, décomplexées, ambitieuses et avec un bel esprit d’équipe puisque, qui dit croissance dit confiance et délégation.

Justement, quel type de management adoptez-vous pour que vos collaborateurs soient heureux ?

Je pense que la transparence est le maître-mot afin que chacun sache dans quelle direction nous allons, par quels moyens, et pour quelles raisons ! Cette transparence passe également par de l’honnêteté de la part de chacun d’entre nous lors de nos échanges. Nous célébrons les réussites de l’entreprise ce qui permet de motiver continuellement les troupes. Cette culture d’entreprise n’a pas réellement été théorisée. Nous mettons un point d’honneur à mettre en valeur la générosité.

Aujourd’hui, quelles sont vos ambitions pour BirchBox ?

Dans un premier temps, nous souhaitons devenir, à l’échelle mondiale, leader de la vente de produits de beauté, et plus encore demain. Nous avons posé les fondations d’une sorte de révolution dans la manière de consommer les produits de  beauté. Nous avons une « culture de la découverte » : sur la boutique en ligne sont disponibles tous les produits testés ainsi qu’une sélection de coups de cœur venant des 4 coins du monde. Soit 6 500 produits et près de 800 marques ! Notre approche atypique du commerce peut prétendre conquérir d’autres activités que celle des produits de beauté. C’est une possibilité que nous envisageons. Ce modèle est à la fois très vertueux et très complexe : d’une part, celui-ci est authentique puisqu’il rapproche la marque et le consommateur. D’autre part, nous attribuons du pouvoir à ce dernier et à la marque également en la mettant à nue. Il y a de nombreuses équipes qui sont encharge de travailler sur tous ces éléments en amont. L’essentiel est de ne pas se disperser en s’éloignant des secteurs qui ne nécessitent pas réellement la consommation par abonnement, et d’apporter une réelle valeur ajoutée de consommation ou de découverte aux clients.

La plus grosse difficulté à laquelle vous ayez dû faire face ?

Le recrutement. La précipitation et le manque d’évaluation des candidats m’ont conduit à faire de nombreuses erreurs. C’est une conséquence classique de la croissance : précipiter un peu le recrutement. Le domaine technique a également été source de difficultés. Selon moi, un manager efficace est quelqu’un qui recrute des gens plus intelligents que lui. Une équipe de qualité décuple sa capacité de travail par rapport à une équipe classique.

4 Conseils de Quentin Vacher

  • Définir clairement qui vous êtes et quel est votre différence.

Peu de start-ups savent vraiment définir qui elles sont. Il vous faudra déterminer votre identité par rapport à la concurrence pour vous imposer.

  • Pensez grand !

Vos rêves doivent être au dessus de vos possibilités. C’est en visant la lune qu’on atteint les étoiles. Cela vous permettra de vous projeter dans les développements nécessaires pour votre entreprise.

  • Faites en sorte que les décisions que vous prenez se concrétisent rapidement.

Si vous n’avez pas, cette capacité c’est que vous ne savez pas où vous allez ! Ayez des plans clairs. à défaut, vous risquez de perdre énormément de temps et de ne jamais rien lancer.

  •  Faites vœu de réalisme sur votre réussite.

Se projeter dans l’avenir ne signifie pas non plus manquer de réalisme. Il vous faudra faire des plans concrets pour avoir des résultats. Ceux-ci ne tomberont pas du ciel.

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