Le bilan annuel du SNEP (syndicat national de l’édition phonographique) met en exergue le potentiel du business du rap dans l’industrie musicale. Le monde du rap est le cœur de l’industrie musicale. Parmi les vingt meilleures ventes 2019, neuf sont des rappeurs ou viennent de ce qu’on appelle vulgairement, la « musique urbaine ». PNL, Ninho, Nekfeu, Jul, Soprano ou encore Aya Nakamura font partie de cette sélection des rappeurs américains devenus des businessmen.
Un courant musical qui a acquis ses lettres de noblesse
Courant musical qui a émergé au début des années 1970 aux États-Unis puis dans l’Hexagone à la fin de la décennie 1980, le rap a vu apparaître des chanteurs aux talents vocaux et aux textes atypiques. Cet univers n’a jamais dissimulé son goût pour le succès et l’argent et ses personnalités peuvent s’avérer être d’excellents hommes d’affaires. Depuis plusieurs années, des rappeurs du monde entier notamment américains ont réussi à devenir des entrepreneurs à succès et ont construit des véritables empires, pesant plusieurs millions, voire un milliard de dollars. Zoom sur deux d’entre eux.
Un business florissant
Le marché du rap français a atteint en 2017, 583 millions d’euros de chiffre d’affaires, selon une étude du SNEP (Syndicat National de l’édition Phonographique, association interprofessionnelle des producteurs de disques, ndlr). Aux États-Unis, ce style musical représente 25 % de la consommation totale de musique, dépassant ainsi le rock, selon un rapport de Nielsen en mai 2017 (groupe américain de mesure et analyse des données consommateurs, ndlr). Il séduit de plus en plus notamment les jeunes générations. Pour se diversifier et fructifier leur succès auprès du public, de nombreux rappeurs américains multiplient les investissements ou créent des entreprises. Indépendamment de la musique, ils se lancent dans d’autres secteurs comme la mode, le sport, l’alcool, la restauration ou les médias.
Puff Daddy, numéro un des rappeurs businessmen
Le rappeur américain Puff Daddy ou P. Diddy, de son vrai nom Sean Combs, fait partie du top 100 des entrepreneurs les plus illustres de sa génération selon le classement établi par Forbes (magazine économique américain, ndlr) en mai 2017. Le chanteur a su ériger un empire colossal atteignant presque le milliard de dollars. Son goût pour l’entrepreneuriat s’est dévoilé très tôt. À l’âge de vingt-quatre ans, en 1993, il fonde son propre label de musique, Bad Boy Records où il produit Notorious B.I.G. qui devient un grand nom du rap au milieu des années 90 et permet la réussite du label. En 1997, l’entrepreneur se lance lui-même dans la chanson avec son album No Way Out, qui remporte un succès avec sept millions de disques vendus aux États-Unis. Il poursuit sur sa lancée en créant entre 1999 et 2015, cinq albums.
Il profite de sa notoriété pour créer plusieurs sociétés dans la mode et les boissons alcoolisées. P. Diddy a lancé sa marque de vêtements de sports « Sean John » en 1999 puis a été nommé au CFDA (Council of Fashion Designers of America, Conseil des créateurs de mode américains en français, chargé de promouvoir le prêt-à-porter, ndlr) comme meilleur concepteur de vêtements pour hommes. Ensuite, Il a fondé plusieurs sociétés concernant la production d’alcool comme Combs Wine & Spirits pour le vin et CÎROC pour la vodka.
Le rappeur s’est également investi dans le cinéma et la télévision
en fondant REVOLT FILMS, société de production audiovisuelle et le média Revolt axé sur la musique. Sean Combs n’échappe pas aux échecs puisqu’il a dirigé deux restaurants Justin’s à New York et à Atlanta qui ont fermé en 2012. Tout en ayant stoppé sa carrière musicale, le chanteur a réussi à fructifier sa fortune par le biais de ses investissements et entreprises. Depuis mars 2018, P.Diddy n’est plus le rappeur le plus riche du monde, avec 825 millions de dollars, soit environ 665 millions d’euros, selon le classement du magazine Forbes. C’est Jay Z qui le détrône.
Jay Z, le « serial entrepreneur »
Avec 900 millions de dollars, Shawn Corey Carter surnommé Jay Z, est l’artiste hip-hop le plus riche de la planète aujourd’hui. Il dépossède P. Diddy de sa première place que celui-ci conservait depuis sept ans. « I’m not a businessman, I’m a business, man ! » chante l’artiste sur le son Diamonds From Sierra Leone Remix de Kanye West.
Cette citation résume à elle seule, le succès et la volonté d’entreprendre du mari de la chanteuse Beyoncé . Il a su vendre sa personnalité et diversifier son business personnel, en signant des partenariats commerciaux ainsi qu’en lançant ses propres marques et entreprises. Il commence sa carrière de chanteur en 1995 sans label puis cofonde une maison de disque Roc-A-Fella Records, avec Damon Dash et Kareem Biggs. Enfin, iI la quitte en 2008 pour en créer une autre, Roc Nation. Depuis son premier album « Reasonable Doubt » en 1996, Shawn Corey Carter a vu l’ensemble de sa discographie parvenir à la première place du classement américain des ventes de disques, avec plus de 100 millions d’albums écoulés.
Véritable « serial entrepreneur »
il multiplie les opportunités dans des secteurs comme la mode, le sport et les boissons alcoolisées. En 1999, il lance sa marque de vêtements Rocawear, qu’il revend à Iconix Brand Group pour 204 millions de dollars en 2007. Il est propriétaire d’une chaîne américaine de bars sportifs et de boîte de nuit, « 40/40 Club » et fut actionnaire de l’équipe de basket, Les Nets de Brooklyn.
Le rappeur a acquis en 2014, le champagne Armand de Brignac, produit par la maison Cattier. Jay Z a tenté de s’engager dans l’hôtellerie en achetant un bien immobilier de 4650 m2 sur le Lower West Side de Manhattan pour le transformer en hôtel de luxe intitulé « J Hotels ». Il a déboursé plus de 52 millions de dollars dans ce projet, mais celui-ci est tombé à l’eau à cause de la crise économique mondiale de 2008. Quant à Tidal, sa plateforme de streaming musical lancé en mars 2015, elle a perdu 37 millions d’euros en 2016 et ne parvient pas à concurrencer Spotify, le leader du secteur.
Ces deux artistes américains célèbres ont réussi à utiliser leur notoriété pour se diversifier dans d’autres domaines que la musique, afin d’augmenter leur fortune. Du côté des rappeurs français, Élie Yaffa alias Booba, a repris les codes de ces personnalités. Lui aussi a bâti un empire autour de divers business, avec près de 185 millions d’euros récoltés. Il a lancé sa marque de vêtements et de parfum Ünkut ainsi que son label Tallac Recordsen en 2004. Le chanteur a également créé son propre whisky baptisé « D.U.C » et son média OKLM consacré au rap, qui regroupe un site web, une radio en ligne et une chaîne de télévision.