Le marketing d’influence avait pignon sur rue et les consommateurs étaient bercés par ses belles paroles et images. Mais cette dernière a été ternie par des pratiques corrompues, entraînant la méfiance des consommateurs et des annonceurs. Or, les consommateurs ne s’en laissent plus conter. Ils ont pris leurs distances à l’égard des propos et vidéos d’influenceurs. Ce phénomène est appelé « Branded Influencer Fatigue ». Quel avenir ?
Le 1er juin 2023, l’adoption de la loi visant à encadrer l’influence commerciale et à lutter contre les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux marque un pas en avant. Elle est le fruit d’un travail assuré à Bercy avec les professionnels du secteur de l’influence, puis avec le Parlement, auxquels ont participé près de 19.000 citoyens et 400 professionnels. Cette loi donne une base juridique.
Un cadre légal qui repose sur deux piliers
Accompagner l’influenceur, avec :
- la création d’une définition juridique de l’activité d’influence commerciale et le rappel de l’application des règles relatives à la publicité,
- la création d’une définition juridique de l’agence d’influenceur,
- l’obligation d’un contrat écrit entre les marques, les agences et les influenceurs sous un libre format, à partir d’un certain montant
- la mise en place d’un « guide de bonne conduite » pour les influenceurs avec les règles et les bonnes pratiques,
- la création des Assises de l’influence responsable qui auront lieu tous les ans à Bercy,
- la valorisation d’une influence responsable et de l’ensemble des initiatives existantes,
- l’application aux influenceurs mineurs le régime des enfants mannequins.
Protéger les consommateurs avec :
- la mise en place d’une brigade de l’influence commerciale au sein de la DGCCRF, avec 15 agents à plein temps,
- l’obligation de transparence des photos, des vidéos retouchées et des représentations d’une silhouette ou d’un visage produit par l’intelligence artificielle,
- l’interdiction de la promotion de certains biens, services ou causes : actes de santé, de médecine, de chirurgie esthétique, de la nicotine, de l’abstention thérapeutique ou d’animaux sauvages,
- des obligations de transparence et de responsabilité en cas de pratique de la livraison directe (dropshipping),
- des plateformes dont la responsabilité peut désormais être engagée et qui auront l’obligation de retirer des contenus illicites,
- des influenceurs installés à l’étranger mieux encadrés, avec l’obligation de nommer un représentant légal en France et de contracter une assurance en cas de dommages,
- des sanctions renforcées et graduées, avec de nouvelles peines d’interdiction, d’exercer son activité et des pouvoirs d’injonction des autorités de surveillance.
Quelques points essentiels sur les influenceurs
L’influenceur est une personne dont la présence constante sur les différents réseaux sociaux lui permet d’influencer le comportement d’achat ou de consommation des internautes qui le suivent ou qui font partie de sa communauté. C’est la raison pour laquelle les marques se servent des influenceurs dans leurs stratégies de marketing et de communication, pour effectuer la promotion de leurs produits et services pour acquérir la notoriété et développer leurs ventes.
Les communautés, quelles sont-elles ?
Si on regarde la taille des communautés des influenceurs, la moitié d’entre elles ont moins de 10.000 membres. Seuls 10% des influenceurs disposent d’une communauté de plus de 100.000 membres. 50% des influenceurs de plus de 100.000 membres ont plus de 4 ans d’ancienneté ce qui met en exergue la valeur fondamentale du temps dans la réputation. Aujourd’hui, les marques comptent davantage sur les nouveaux influenceurs car leurs tarifs sont compétitifs et ils s’engagent sans défaillance. Pour travailler avec les influenceurs, 27,5% des marques le font seules, les autres utilisent des agences digitales ou com (24%) ou des agences / plateformes expertes en marketing d’influence telles Reech (48,5%).
Les consommateurs, de moins en moins fidèles aux influenceurs
Les consommateurs recherchent les bonnes informations avant tout auprès de leurs « pairs » pour choisir et commander. Les marques, conscientes de ce changement ont transformé leurs stratégies et préfèrent aujourd’hui s’adresser à des micro-influenceurs plutôt qu’à des stars car ils leur paraissent plus fiables et les retombées s’avèrent excellentes auprès de leurs communautés.
La 7ème édition de l’étude réalisée par Reech sur « Les influenceurs et les marques » en 2023 nous donnent de nombreuses informations sur ce monde en constante évolution.
L’utilisation des réseaux est très largement générationnelle.
On distingue :
Les réseaux « moins de 24 ans / Z »
Snapchat, 81% des 18-24 ans, talonné par TikTok à 78% – contre 15% chez les plus de 65 ans sur ces deux réseaux.
Les réseaux « moins de 35 ans / Y »
Instagram 84% d’utilisation chez les 18-34 ans, 31% chez les plus de 65 ans. Twitter est plus présent chez les jeunes (41%) que chez les anciens (22%), de même que Twitch (24% contre 3%).
Les réseaux «plus de 35 ans / X et Boomers»
Facebook 83% des 35 et plus, mais 38% des 18-24 ans (en 5ème position, ex-aequo avec Twitter)
Les réseaux transgénérationnels
YouTube se distingue par sa capacité à rassembler les générations. Le réseau de partage de vidéos est certes moins utilisé par les plus de 65 ans (à 55%) que par les plus jeunes (72% des 18-24 ans), mais il est le réseau se maintenant le mieux sur l’ensemble des tranches d’âge.
Quelques réseaux, enfin, semblent nettement genrés
Pinterest 27% des femmes et 14% des hommes, alors que Twitch rassemble 15% des hommes et 8% des femmes. D’autres réseaux marquent également une différence : Instagram et Snapchat présentent une dominante féminine, et Twitter une dominante masculine.
Les dérives et la perte de vitesse
Au premier rang des étapes à franchir dans le chemin vers une influence plus responsable, se trouve le bannissement des arnaques : 68% des répondants sélectionnent ce combat (et jusqu’à 77% des 50 ans et plus). Certaines causes sont générationnelles : la protection de l’environnement est citée par la moitié des moins de 35 ans (contre 39% pour le reste de la population), alors que la « non-représentation de modes de vie artificiels » n’est choisi que par 33% des moins de 25 ans (mais 49% des tranches d’âge
supérieures.
Enfin, le seul combat véritablement genré est la fin des corps retouchés (57% des femmes vs 45% des hommes). Ces causes font singulièrement écho aux causes mentionnées par les créateurs et créatrices
Le ressort de fonctionnement, la confiance, font l’objet de critiques acerbes. Plus avertis, plus exigeants, les consommateurs ont pris leur distance à l’égard des contenus émanant d’influenceurs. Ajouter à cela les nombreux dérapages et la multiplication des partenariats payants ont entraîné le désintérêt appelé la « Branded Influencer Fatigue ». Certains influenceurs, en accumulant les collaborations pour davantage de profits, ont perdu leurs abonnés qui ne se reconnaissaient plus dans leurs valeurs, ou ont vu leurs taux d’engagement s’effondrer.