Maia, l’entreprise engagée !

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Interview de Marie Delattre, fondatrice de Maia, qui nous montre que l’on peut allier utilité et entrepreneuriat.

Comment vous est venue l’idée de créer Maia ?

J’ai travaillé pendant 10 ans chez un des leaders du secteur, qui s’appelle SC Johnson spécialisé dans les lessives et les produits ménagers. C’est une catégorie de produits que je connaissais bien, surtout concernant les attentes des consommateurs qui demandent davantage de transparence sur les produits et moins de toxicité. L’idée m’est donc venue à partir de mon expérience. J’avais senti qu’il y avait quelque chose à créer, une nouvelle marque qui apporte cette réassurance à la fois en termes de transparence des compositions et de non-toxicité des produits.

Cela fait longtemps que vous travaillez dans la GMS : qu’est-ce qui vous a fait sauter le pas ?

Cela a été un déclic personnel – comme beaucoup d’entrepreneurs, d’ailleurs – c’est la naissance de ma fille, qui est née avec des soucis de santé. J’avais également cette volonté de donner un peu du sens à mon métier. C’est aussi de là que vient, je pense, l’ADN de transparence absolue et de non-toxicité des produits. Il y avait effectivement quelque chose à créer sur ce marché.

Avant de la créer votre entreprise, vous avez fait un an et demi de recherche et développement, ou ça s’est passé après ? Quel a été l’ordre ?

Maia a été officiellement commercialisée en avril 2021, cela fait trois ans. Mais effectivement, en amont, il y a eu deux ans de recherche et développement pour trouver les bons partenaires français puisque tout est produit en France chez Maia. Il fallait en trouver qui accepte notre cahier des charges et notamment un qui exclut totalement les sulfates, qui sont omniprésents dans toutes les marques aujourd’hui traditionnelles du marché. Cela a pris deux ans de recherche et développement pour identifier un laboratoire qui accepte de travailler avec nous et formuler jusqu’à ce que nous arrivions à la même efficacité, mais sans sulfates.

Qu’est-ce qui freinait les laboratoires au fait de vous aider à produire vos produits au début ?

La formulation. Il y a beaucoup de laboratoires en France qui produisent en marque blanche. Cependant, souvent à partir des formules qui sont déjà toutes prêtes sur l’étagère et sur lesquelles il suffit d’apposer une marque, tout simplement. Nous, dans les formulations des produits ménagers, nous ne voulions pas de sulfates – ce qui est le cas dans 100 % des produits aujourd’hui. Nous voulions quelque chose de beaucoup plus sain que ce qui existe sur le marché. C’était une reformulation totale avec une même promesse d’efficacité, donc peu de laboratoires voulaient nous suivre sur ce projet-là au début.

Donc, il a fallu les convaincre de trouver la solution ?

J’en ai convaincu un au bout de douze portes closes. C’est pour cette raison que cela a été très long en termes de création mais aussi de développement produit. Nous avons eu un an et demi de développement pour parvenir à la même efficacité sans ces sulfates, sans ces ingrédients nocifs. Normalement, un temps de développement produit sur ces catégories, c’est environ de l’ordre de six à neuf mois. Or, nous avons presque dû attendre le double. Mais maintenant, nous avons trouvé les bons actifs qui remplacent les sulfates. Néanmoins, d’un autre côté, cela rend les choses plus simples pour le développement de nouveaux produits qui arrivent.

Qu’est-ce qui distingue Maia de vos concurrents ?

Deux choses. Comme je vous le disais, déjà, la non-toxicité absolue de nos produits, puisque nous sommes la seule marque française aujourd’hui qui est non seulement végétale et certifiée Ecocert, mais aussi sans sulfates dans nos formules. C’est une réelle promesse de non-toxicité absolue sur tous nos produits. Nous veillons à être très transparents sur nos compositions et nous sommes les seuls à les afficher en intégralité sur l’étiquette – rien ne l’oblige, aujourd’hui, dans la loi française. C’est dans notre ADN, ce qui fait qu’aujourd’hui, nous avons effectivement un large public de familles qui nous suit depuis nos débuts.
La deuxième, c’est le combat que nous menons contre le plastique à usage unique, dans la mesure où tous nos produits sont proposés sous format rechargeable, avec des « Doypacks » qui sont innovants puisqu’ils sont recyclables en filière papier. Par conséquent, ils éliminent le plastique dès qu’on achète la recharge du produit.

Comment avez-vous fait pour que toute une communauté vous suive depuis le début ?

Cela s’est fait tout d’abord par le bouche-à-oreille, tout simplement. Très tôt, nous avons incorporé les avis de nos clients dans le développement de nos produits. Avant même que les premiers produits soient lancés, nous avions ainsi une petite communauté – d’une centaine de personnes – qui a testé les produits à nos côtés et qui nous a accompagnés. Puis, cette communauté n’a fait que grandir. Aujourd’hui, nous avons ainsi 15 000 clients et nous impliquons très régulièrement nos clients dans la création de nos produits, que ce soit dans leur feed-back sur les produits qu’ils souhaitent que nous lancions, sur des essais de formules avant de lancer sur le marché, sur des parfums. Cela joue beaucoup sur la fidélisation et l’acquisition de nouveaux clients à Maia.

Quels ont été les grands défis de l’entreprise depuis le début ?

Le premier défi, c’est la recherche du laboratoire. Cela a été la première difficulté. Pourtant, j’avais un bon carnet d’adresses. J’ai eu beaucoup de portes qui sont restées closes avant de trouver un laboratoire qui accepte notre cahier des charges.
Le deuxième défi a été de fidéliser notre clientèle sur le Web. Nous sommes sur un marché, aujourd’hui, qui est très « bataillé ». Certes, c’est une bonne chose parce que cela veut dire qu’il y a une réelle attente des consommateurs, mais en contrepartie, il faut se faire place parmi les marques qui se lancent.
Et le dernier défi, c’est le nôtre aujourd’hui, c’est que nous soyons distribués en grande distribution. Maia prend en conséquence une autre dimension en termes de structuration d’équipe, de production, de logistique pour pouvoir livrer la GMS. C’est encore un autre challenge intéressant de 2024 !

Est-ce que cela a été le plus grand défi que vous avez rencontré, ou est-ce qu’il y en a eu d’autres ?

Quand on est entrepreneur, on a toujours des défis et il y en a quotidiennement. Cela a été de trouver un laboratoire mais aussi deux levées de fonds ou encore entrer en GMS. Par exemple, c’est un défi énorme parce qu’il faut convaincre les distributeurs et puis se mettre d’accord avec eux sur les tarifs. Il faut, surtout, assurer derrière en termes de production, de logistique, de commercialisation. Ce sont des défis quotidiens, mais c’est ce qui rend le métier d’entrepreneur intéressant.

Vous avez commencé entièrement sur le Web, si je comprends bien, et plus récemment, vous allez intégrer la GMS. C’est cela ?

Exactement. Je voulais avoir une marque qui soit déjà connue, qui ait déjà une base de clients, sur lesquels nos produits étaient éprouvés, avant d’arriver en GMS. C’était un calcul de notre part de proposer une marque à terme accessible en physique ou en digital, mais avec une notoriété en partie établie avant d’arriver dans une grande enseigne.

La première levée de fonds, vous l’aviez faite pourquoi ? C’était en 2022, je crois ?
Ma première levée de fonds a eu lieu. Celle-ci avait pour objectif de financer la croissance Web et de continuer à lancer des nouveaux produits. Nous déroulions au fur et à mesure notre business plan.

J’ai vu que vous avez fait une deuxième levée de fonds en 2024 : est-ce pour gérer le BFR lié à cette nouvelle activité de GMS, ou est-ce pour d’autres raisons ?

C’était bien sûr pour gérer le BFR parce qu’évidemment nos productions ne sont plus du tout les mêmes. Il s’agissait aussi de gérer une exécution en magasin. Ce n’est pas juste un besoin en fonds de roulement, mais assurer une équipe commerciale qui visite le point de vente pour aider à la théâtralisation en point de vente. Ceci afin de faire connaître la marque. C’était ainsi pour l’exécution en grande distribution, que ce soit au niveau production ou commercialisation.

Êtes-vous déjà en GMS ?

Nous sommes présents depuis cette année chez Monoprix et nous étions déjà présents chez Naturalia, chez Cora et chez Match. Nous sommes en discussion au niveau régional, avec d’autres enseignes comme Auchan et Leclerc.

Est-ce que cela a été facile de convaincre la GMS de vous intégrer ou cela a été le parcours du combattant ?

Je dirais que c’est oui et non. En fait, il y a plusieurs choses qui se passent dans cette catégorie aujourd’hui. Je ne sais pas si vous êtes familier avec la loi Descrozaille sur le secteur DPH, qui limite le taux de promotion qu’on peut appliquer sur les produits de notre catégorie. Or, c’est un gros manque à gagner pour les enseignes aujourd’hui.
Face à cela, nous avons des enseignes qui peuvent avoir des stratégies très différentes, certaines qui vont miser plutôt sur de la MDD – de la marque de distributeur – pour compenser. Nous ne sommes pas forcément dans leur top priorité en termes de référencement. Mais d’autres enseignes, au contraire, cherchent des relais d’innovation et sont très à l’écoute de marques françaises innovantes. Nous jouons ainsi notre rôle d’innovation et de relais de croissance par rapport à ce contexte qui est le leur aujourd’hui.

Qu’est-ce qui vous a le plus surpris depuis le début de votre aventure ?

Ce qui m’a le plus surpris depuis le début de l’aventure ? Je dirais que c’est l’engouement de nos clients. C’est une vraie récompense pour nous. Nous sommes quand même sur une catégorie, sur une typologie de produits où il y a quand même peu d’affect : nous n’allons pas nous mentir, ce n’est pas sexy, les lessives. Pourtant, nous avons un réel engagement de nos clients et des messages chaleureux quotidiens, que nous recevons de leur part. Quand nous résolvons un problème d’irritation de la peau dû à une lessive, c’est des dizaines de messages que nous recevons au quotidien. Nous avons une gamme bébé et grâce à elle nous accompagnons de jeunes parents. Nous recevons énormément de messages de remerciements parce que nous avons éliminé des tâches sur le linge. Il existe un affect sur notre marque qui est très fort et je trouve que c’est une belle récompense sur cette typologie de produits.

Est-ce que vous avez, au début, tenté de contacter toutes les assos, tous les groupes un peu fermés – tout ce qui est lié à la peau, justement – pour créer votre communauté, ou est-ce qu’elle s’est créée un peu naturellement ?

Nous avons ciblé des familles au début, que nous avons contactées. Nous avons fait un peu de ciblage sur Meta pour recruter des familles qui voulaient bien nous aider à tester nos produits. Nous l’avons réalisé avec le client plutôt qu’avec des associations, des familles qui acceptaient en direct de tester nos produits et qui sont devenues clientes et qui ont fait jouer le bouche à oreille par la suite.

Aujourd’hui, comment comptez-vous vous faire connaître, puisque vous intégrez la GMS ? Parce que je suppose qu’il faut sortir du lot, c’est assez difficile.

C’est le nouveau défi d’aujourd’hui. Au-delà d’être capable de livrer la GMS, c’est d’assurer une force de vente derrière. Il s’agit d’un gros défi : qui passe en magasin ? Qui éduque les chefs de rayon ? Qui met de la théâtralisation en magasin pour faire connaître aussi la marque, au niveau de tout ce qu’on peut mettre en PLV en rayon, en théâtralisation hors rayon quand nous faisons des opérations promotionnelles ?
Nous allons réaliser des choses très ludiques à partir du mois de juin en termes de théâtralisation sur ce rayon qui n’ont jamais encore été vues. Nous déployons beaucoup de moyens en ce sens-là pour faire connaître la marque aussi sur le point de vente, et pour raconter une histoire aussi sur le point de vente, parce que sur le digital, nous avons toute la marge de communication possible sur notre site Web. Dans un rayon, nous sommes perdus au milieu de 150 000 produits. En conséquence, il faut être visible. C’est notre pari du moment.

Vous êtes combien aujourd’hui, en termes d’équipe ?

Aujourd’hui, nous sommes six à temps plein sur Maia, plus une force de vente externalisée. L’objectif c’est de pouvoir déjà internaliser petit à petit notre force de vente. J’aimerais bien arriver dès l’année prochaine, à tripler les effectifs.

Obtenir les certifications telles qu’Ecocert, est-ce que cela a été difficile ou c’était facile ?

C’est très lourd « d’obtenir » une certification Ecocert parce qu’il y a énormément d’audits en amont, en aval, tous les ans. C’est un engagement d’entreprise qui est assez considérable, déjà financièrement, et même en termes de « ressources humaines », mais c’est quelque chose qui est quand même assez bordé. Nous, ce qui a été encore plus compliqué, c’est qu’on a été plus loin encore dans nos certifications, parce que nous allons aussi s’accompagner de formations toxicologues sur notre gamme bébé, de certifications additionnelles comme la compatibilité au contact alimentaire pour des promesses de non-toxicité. Nous nous challengeons en tant que marque pour faire plus que ce qui existe aujourd’hui sur le marché en termes de certification. C’est plus lourd, mais en contrepartie, c’est aussi une confiance plus forte que nous avons de la part de nos consommateurs et une incontestable transparence produit que, nous seuls, nous pouvons réaliser aujourd’hui.

Est-ce que vous avez d’autres points que vous souhaitez aborder ?

J’aimerais insister sur notre engagement pour le zéro plastique. Je pense que c’est un énorme enjeu sur ce marché. Je pense que nous sommes leader en termes d’innovation, parce que nous avons des recharges qui sont faites en papier de pommes par exemple. Nous allons effectuer des recherches, même en termes d’emballage, qui ne sont jamais vues sur ce marché – et sur le marché de la GMS en général – pour accompagner aussi et nos clients et les enseignes dans une promesse de zéro plastique. Je pense que c’est quelque chose que tout le monde devrait prendre en compte davantage.

Il y a une directive européenne, je crois, là-dessus, non ?

Oui, 2025, réduction du plastique à usage unique. Je vous invite à aller regarder un rayon de produits ménagers et nous ne pouvons dire qu’une chose : nous n’y sommes pas encore. Cela fait partie des raisons pour lesquelles, nous nous sommes intéressés à la grande distribution, aujourd’hui, évidemment. 

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