Les chaussettes de l’archiduchesse « sont-elles sèches, archisèches ? »

Interview de Marie Gombero directrice de la marque française de chaussettes Archiduchesse qui fête ses 15 ans !

Vous avez repris la direction opérationnelle d’Archiduchesse…

Je suis directrice opérationnelle depuis deux ans pour la marque Archiduchesse. Archiduchesse a été créée en 2009 par Patrice Cassard. Le fondateur ne s’occupe plus de la gestion de la marque. Elle a été reprise en 2017 par Camille Zamo, qui m’a laissé la gestion il y a trois ans. Camille m’a ainsi nommée directrice opérationnelle, il y a deux ans. Elle ne s’occupe désormais que de la gestion, la comptabilité, des fiches de paye et du budget prévisionnel que nous gérons ensemble.

Dans les grandes lignes, vous savez ce qui s’est passé avant que vous arriviez ?

La marque a été imaginée autour d’un seul modèle de chaussettes qui s’appelle la bouclette et qui devait être déclinée en plusieurs coloris pour matcher avec des paires de baskets unies et blanches. Patrice s’est associé avec la Maison Broussaud, qui est notre fabricant actuel et notre partenaire historique depuis 15 ans, pour créer ces chaussettes. Puis, il a vendu la marque à Camille Zamo en 2017. Camille a repris la marque et elle a fait évoluer tous les produits, c’est-à-dire qu’elle a créé d’autres gammes de produits, notamment des paires un peu plus féminines, toutes les paires à paillettes. Elle a également ouvert la marque à d’autres catégories de produits.

Vous ne faites donc plus seulement des chaussettes ?

Même si les chaussettes, c’est notre cœur de métier aujourd’hui, nous avions envie de proposer d’autres produits made in France à des prix raisonnables à nos clients. En 2019, Camille a créé le Vestiaire Raisonné. Il s’agit d’un ensemble de produits intemporels et durables, soit fabriqués en coton bio, soit fabriqués à partir de matières recyclées. Ce vestiaire va regrouper des produits comme des collants, une paire de baskets, des chaussons, des sous-vêtements, des T-shirts. Je suis, pour ma part, arrivée après la Covid. J’ai repris la marque d’abord en tant que responsable e-commerce et ensuite Camille est tombée enceinte. Elle a eu d’autres projets personnels et elle m’a laissé la marque il y a deux ans.

Comment s’est passée cette transition ?

Cette transition s’est déroulée assez rapidement puisque nous étions une équipe de trois à la base. Je gérais déjà pas mal de choses. J’avais repris la partie B2B et déjà géré le service client, les communications, le marketing, etc. Je connaissais plutôt bien le fonctionnement de la marque de ce fait. J’avais réussi à plutôt bien prendre en main l’opérationnel et c’était plutôt la vision entrepreneuriale qu’il fallait que j’arrive à avoir pour reprendre la marque. Cela s’est plutôt passé harmonieusement. Aujourd’hui, Camille est présente une fois tous les deux, trois mois pour que nous puissions nous voir et discuter des prochaines opérations ou des communications importantes. Sinon, au quotidien, j’ai une chef du projet e-commerce qui m’accompagne et une assistante en communication digitale également.

Quelles ont été les étapes jusqu’à aujourd’hui ?

Nous avons fêté nos 15 ans cette année. C’était un gros événement et c’était la première fois qu’on collaborait avec une agence de communication pour faire un événement digital pour cet anniversaire. C’était exceptionnel parce que nous avions fêté nos 10 ans, mais nous avions juste fait un défilé pour nos clients en chaussettes. Celui-ci c’était super bien passé, mais nous avions vraiment envie de voir un peu plus large. Avec Reprazent, nous avons organisé des micro-trottoirs avec des ambassadeurs Instagram et TikTok.

Qu’est-ce que vous avez fait dans le détail ?

Nous sommes allés à la rencontre des gens. Nous, nous sommes une marque qui est 100 % e-commerçante. Nous avons quelques revendeurs en France et à l’étranger, mais nous n’avons pas de boutique en propre. Nous n’avons donc pas vraiment la possibilité de rencontrer les gens à part sur les salons. C’était intéressant de voir aussi ce qu’ils pensaient de notre marque, de nos produits, de notre nom, parce que notre nom, les fait réagir quand même… Les gens, s’arrêtent souvent sur « Archiduchesse » et commencent à énoncer la ritournelle des chaussettes de l’Archiduchesse. Nous étions partis un peu de cette idée que les gens s’arrêtaient sur notre nom et qu’il fallait que nous fassions quelque chose avec.

L’agence est partie sur ce principe-là de micro-trottoir pour défier les gens à dire cette expression, ce virelangue. Et si ils y arrivaient, nous leur offrions des chaussettes, nous leur offrions des bonnets, des tours de cou. Nous l’avons prolongé sur les réseaux sociaux avec un concours pour faire gagner un voyage en Laponie à deux personnes pour fêter les 15 ans.

Et sinon qu’avez-vous fait d’autres ?

Nous avons eu l’envie d’évoluer sur la partie B2B parce qu’aujourd’hui, nous faisons 80 % de notre chiffre d’affaires sur le B2C et uniquement 20 % sur le B2B. Nous pouvons donc évoluer sur la partie B2B. Je pense qu’il y a encore plein de revendeurs que nous pourrions approcher pour leur vendre nos produits. J’ai eu envie de faire grandir cette partie et pour cela j’ai implanté la marque sur deux plateformes B2B, en l’occurrence Ankorstore et Faire. Ces deux plateformes proposent des multimarques où plusieurs marques sont présentes et un revendeur peut venir faire son marché et ses commandes multimarques.


Aujourd’hui, nous avons un site B2B qui est dédié à nos revendeurs et ces derniers nous contactent directement via un email pour créer un compte et acheter des produits pour les revendre dans leur boutique. Mais ce site B2B n’est pas très accessible parce que nous ne voulons pas que tout le monde puisse y accéder. Pour nous, il faut que nous soyons présents sur des grandes plateformes où des pays à l’étranger peuvent pénétrer. Nous avons ainsi gagné des revendeurs via ces plateformes, notamment en Belgique, où là, nous avons cerné un réel intérêt pour la chaussette.

Nous avons aussi accéléré les ventes un peu éphémères sur tout ce qui est plateforme comme Choose ou les Bienfaiteurs. Les Bienfaiteurs, c’est la première vente que nous allons réaliser avec eux la semaine prochaine. C’est une plateforme qui, un peu comme une Choose, propose des ventes éphémères sur des marques plutôt cool comme Archiduchesse et qui propose une partie du chiffre d’affaires reversé à l’association de notre choix. C‘est plutôt enthousiasmant.

Vous avez une dimension environnementale importante je crois ?

J’ai poursuivi sa mise en place parce que la question environnementale me tient aussi à cœur chez Archiduchesse. Nous essayons de faire très attention au stock de nos produits. Pour Broussaud et nous, il s’agit d’un sujet que je qualifierais d’essentiel. J’étais déjà au sein de l’entreprise quand cela a commencé mais j’ai approfondi le projet. D’ailleurs, Maison Broussaud nous avait proposé de créer une chaussette à partir des déchets de fabrication de l’usine et nous avons acquiescé tout de suite. Nous avons appelé cette chaussette Re-Née, la chaussette qui renaît de ses propres cendres. Aussi, avec le vestiaire Raisonné, nous essayions de faire des produits durables et intemporels. Je trouve qu’avec Re-Née, nous avons poussé encore plus l’intérêt sur ce sujet et sur l’engagement.

Pour moi, il faut remercier les clients qui recyclent et qui s’engagent pour le made in France, etc. Ce que nous avons tendance aussi à faire, nous, en tant que particulier, c’est dès que nous avons une chaussette trouée, nous la jetons. Sauf qu’une chaussette trouée peut se recycler et peut se réutiliser pour faire plein de choses. Nous nous sommes associés à une plateforme qui s’appelle Redonner et qui propose des remises pour remercier les clients qui recyclent leurs produits, les produits qu’ils ne mettent plus ou qui sont abîmés. Nous l’avons aussi mis en place sur notre site. Ainsi, toutes les personnes qui déposent des produits, des chaussettes trouées ou inutilisées ou solitaires dans un point de collecte, ont 10 % de bons d’achat pour acheter des nouvelles chaussettes.

Pour l’avenir quels sont vos grands défis ?

Les dernières années ont été assez compliquées pour la marque. Nous avons eu des très belles années COVID, donc 2020, 2021, où nous avons dépassé le million en termes de chiffre d’affaires chez Archiduchesse. Les années qui ont suivi ont été difficiles pour le monde du textile. Nous sommes cependant satisfaits de nos résultats, mais nous aimerions faire plus et cela se révèle compliqué. L’idée, c’est vraiment de gagner en visibilité et de continuer à recruter de nouvelles personnes. Ce que nous aimerions réaliser, c’est une refonte de notre site internet parce que nous sommes passés sur Shopify en 2021 et depuis, nous n’avons pas réactualisé le site.

Notre idée, c’est aussi d’offrir un nouveau site à nos clients avec une expérience de navigation et des produits plus modernes. Cela va être un beau projet de début d’année. Je pense qu’après, le plus fondamental est de continuer à évoluer sur le B2B et de gagner d’autres marchés. C’est pourquoi nous avons un agent commercial qui travaille pour le Japon. J’aimerais faire en sorte que nous puissions grandir encore plus sur le marché asiatique parce que le made in France les intéresse. Je pense que cela peut vraiment fonctionner.

Quelle a été la plus grande difficulté que vous avez rencontrée depuis que vous avez repris ?

La plus grande difficulté a été de faire évoluer la marque mais avec une petite équipe, c’est le plus difficile. Il y a eu pas mal de changements d’équipe en trois ans, notamment parce qu’il y a eu des départs et c’était un peu compliqué parce que quand on recrute une nouvelle équipe, il faut la former. Toutes les missions qu’on peut avoir autour, nous les mettons en stand-by parce que nous souhaitons avoir une équipe qui soit opérationnelle et investie. Si nous-mêmes, nous ne sommes pas investis avec eux pour les former, nous perdons l’intérêt de la personne.Aussi, de septembre jusqu’à décembre-janvier, il y a une accélération car nous sommes une marque saisonnière. C’est la plus grosse partie de l’année pour nous et elle est donc très importante. En ce moment, nous enchainons les salons, la collection de Noël à lancer, etc.

En plus, cette année, nous avions les 15 ans donc cela a été sportif. Je pense que c’est la difficulté la plus dure à gérer car nous sommes une belle entreprise et que nous existons depuis quand même 15 ans. Notre entreprise est assez forte, mais la faiblesse, c’est aussi de devoir faire avec peu de personnes pour le moment.

Est-ce qu’il y a un point que je n’ai pas abordé et que vous souhaitez aborder ?

Non, juste, portez nos chaussettes et vous verrez ! 

3 Conseils de Marie Gombero

  • Réussir à se projeter. Quand on crée une marque avec une idée de base qui est bonne et que le produit est beau, etc. il faut réussir à se projeter parce qu’on a tendance à se dire : « Je crée ma marque, j’ai une idée géniale, etc. » et ne pas réussir à voir plus loin que le produit. C’est ce que j’essaie de faire, en tout cas avec Archiduchesse, même si elle existe depuis déjà 15 ans. J’essaie de me projeter sur qu’est-ce que je vais pouvoir mettre en place, qu’est-ce que je vais pouvoir faire de plus ? Je pense que c’est assez essentiel pour qu’une entreprise dure dans le temps.
  • Bien s’entourer. Si on est dans une équipe ou si en tout cas, on a des partenaires ou des collaborateurs, s’il y a un maillon faible, cela se ressent tout de suite quand on n’est pas beaucoup au début et qu’on crée une entreprise. Si on est bien entouré, on peut avoir de très bons conseils, on peut avoir des brainstormings qui nous font évoluer.
  • Se sentir vraiment comme le porteur du projet.
    On ne va pas créer une marque de chaussettes si on ne porte pas de chaussettes et si on ne montre pas les chaussettes. On ne va pas être la référence couleur depuis 2009 si on ne porte pas de couleurs. On ne va pas créer des motifs fun pour tout le monde si nous-mêmes, on n’est pas créatifs et on n’a pas cette inspiration-là pour la mode. Je pense que c’est un atout majeur d’être porteur du projet parce que c’est bien d’avoir une idée qui part d’une problématique client, mais c’est mieux d’avoir vécu une problématique pour justement savoir ce qui est essentiel pour le client.
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