Interview de Sébastien Eloir, repreneur et dirigeant de Ménard Darriet Cullerier.
Quel est votre parcours professionnel ?
Diplômé de l’ISG, j’ai travaillé 7 ans chez Hertz et 5 ans dans la manutention chez Jungheinrich. Au cours de mon expérience de salarié, j’ai exercé des responsabilités variées principalement dans les domaines vente, marketing et gestion. Mon parcours fait de moi plutôt un généraliste.
J’ai ensuite été repreneur pendant 17 mois, ce qui a été un vrai métier, même s’il n’a été que temporaire. Il faut s’y former, c’est une expérience de transition entre le salariat et l’entreprenariat. Depuis septembre 2007 je suis officiellement gérant de Ménard-Darriet-Cullerier (MDC), spécialisée dans la mécanisation forestière, sur les outils de nettoyage, entretien, reboisement et débardage.
Pourquoi avoir choisi de reprendre une entreprise ?
Après avoir participé aux destinées de la filiale française de Jungheinrich en faisant parti du comité de direction, j’ai voulu être mon propre patron pour voir si les décisions que j’allais prendre en tant que chef d’entreprise seraient les bonnes. J’avais envie de pouvoir entreprendre sans éprouver les lourdeurs inhérentes aux grandes structures et en restant près du terrain.
Quelles sont les difficultés que vous avez rencontrées ?
La première difficulté de mon parcours de repreneur a été celle de trouver l’entreprise en adéquation avec mes compétences de manager généraliste et avec mon apport personnel limité (inférieur à 150 K). Je cherchais donc une entreprise ayant entre 5 et 20 salariés, dont la valorisation était inférieure à 500 K, avec une équipe structurée et un savoir-faire ne dépendant pas uniquement du chef d’entreprise. La localisation géographique m’importait peu car ma famille et moi étions prêts à déménager s’il le fallait. Le marché est hélas étroit sur cette typologie. Peu d’entreprises et beaucoup de candidats ! Il faut réaliser un important travail de prospection et avoir un brin de chance pour y arriver.
La seconde difficulté majeure a été le financement de la reprise. Le métier des banques n’étant pas celui de prendre de risques majeurs dans le financement de l’activité des entreprises, il faut monter un dossier de financement de reprise crédible. Le financement de la reprise de MDC a duré plus de 4 mois alors que le montant emprunté était plutôt faible (moins de 200 K) avec un apport important (plus de 40 %).
Quels sont les conseils que vous donneriez aux repreneurs ?
Après deux années passées en tant que gérant je pense que les difficultés rencontrées lors du parcours de repreneur préparent à la vie de chef d’entreprise. Soit on a les capacités et la volonté de les franchir pour devenir chef d’entreprise, soit de toute façon il vaut mieux oublier le désir de se mettre à son compte. Les difficultés vécues par le repreneur ne sont que les premières de la longue vie d’entrepreneur !
Afin de relater mon expérience de repreneur, j’ai rédigé un blog. Il est consultable sur : « http://objectif-reprise.blogspot.com/2006/04/nouveau-dpart.html » Chaque reprise est différente, mais je pense que mon parcours est assez typique.
Si cela était à refaire, que changeriez-vous ?
Rien, car cela a été pour moi un parcours initiatique, palpitant mais passionnant. Je préparerai peut-être davantage l’après-reprise et notamment la partie gestion des ressources humaines. L’aspect humain avec le cédant, mais aussi avec l’équipe, est fondamental pour la réussite du projet.
A ce sujet, comment s’est passé l’accompagnement par le cédant ?
Le cédant m’a laissé progressivement prendre les rênes. Cette reprise a eu cela d’exceptionnel que le cédant m’a permis d’entrer dans l’entreprise avant même que le closing soit signé. Nous avons élaboré ensemble un plan de reprise dans lequel nous avons abordé les différentes fonctions et les délais pour la transmission. Avoir été cadre dans plusieurs grandes entreprises m’a aidé mais ce n’a pas été suffisant pour savoir gérer tous les aspects de la vie d’une PMI ! Heureusement, nous avons abordé progressivement les différents sujets et le cédant m’a accompagné et formé sur les produits. La prise en main de la gestion de la trésorerie a été un autre point fondamental car, avant cette expérience, je n’avais abordé que cet aspect de manière superficielle alors que cela représente un point crucial !
L’accompagnement a duré 6 mois, mais nous continuons à échanger de manière régulière. Il me fait bénéficier de son regard extérieur qui me permet de prendre du recul. Ma reprise ayant été une vraie histoire humaine je voulais que mon cédant trouve un projet pour l’après-cession. Après 23 ans dans l’entreprise je l’imaginais mal rester à ne rien faire. Nous avons donc exploré quelques pistes dont l’ouverture de chambres d’hôtes. Cette piste a été la bonne car désormais il gère une superbe chambre d’hôtes, « La Villa Bordeaux ».