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Inverser les rôles le temps d’une journée : une fausse bonne idée ?

Inverser les rôles le temps d’une journée : une fausse bonne idée ?

La journée inversée : une innovation managériale qui peut récolter les fruits d’une meilleure cohésion des équipes. Quand on regarde le poste d’un collègue, on observe les avantages apparents et non les contraintes. Ils ont beau travailler ensemble, se croiser dix fois par jour, vos salariés ne savent pas forcément ce que fait son collègue. Pire, les critiques fusent et les a priori, idées reçues, amalgames  sont parfois légions sur le rôle de chacun dans l’entreprise. Construire une team passe parfois par des moyens décalés. Improviser une journée inversée (ou reversal day) est-ce une bonne idée ?

Chef d’entreprise, vous vous rendez à la machine à café quand, sur votre chemin, vous entendez une réflexion sarcastique du service commercial : « Les créa de toute manière, ils ne savent pas ce qu’est rusher. Ils cherchent… l’idée ! ». De son côté, vous entendez le comptable, soupirer de stress : « S’ils étaient à ma place, peut-être qu’ils comprendraient… ». Votre café à la main, vous n’en pensez pas moins vous aussi, avec votre pile de dossiers qui vous regarde l’œil narquois sur votre bureau. Il est peut-être temps de bouleverser les habitudes et les missions de chacun en mettant en place au boulot une expérience inédite : 24h dans la peau d’un autre.

Forger la complémentarité de l’équipe

La journée inversée est un concept importé des Etats-Unis et très médiatisée, ces dernières années en France, avec par l’exemple de l’agence de publicité Lilloise, Sioux, qui l’organise une fois l’an depuis 1997 pour cultiver son esprit « tribu ». Si l’initiative est rare dans l’hexagone, il s’agit pourtant d’un outil de management décalé et concret, qui peut surprendre vos employés autant que les clients positivement.

Quel est le principe ?

Le principe est le suivant. Chaque employé inverse son rôle dans l’entreprise et à permuter temporairement de poste avec un autre salarié. Chez Sioux, la répartition se fait par tirage au sort. Les avantages d’une telle journée sont nombreux. L’événement permet de favoriser l’ouverture d’esprit et l’apaisement entre les postes. Se mettre dans le job d’un autre permet de gérer les conflits et de comprendre les missions de chacun, souvent méconnues alors même que les bureaux se font faces.

Vivre les galères de chacun, les enjeux du poste ainsi que les responsabilités permettent de construire une relation d’écoute et d’indulgence. Il s’agit d’un excellent outil pour décloisonner les services et faciliter la communication entre les salariés. Les compétences de chacun sont mises à nues et valorisées. C’est aussi une opportunité de sortir du quotidien de manière originale et de construire un esprit d’équipe et de complémentarité grâce à une journée à part entière dont tous se souviendront.

Un outil de communication concret donc qui peut avoir un certain succès au sein de votre entreprise pour un coût modéré de mise en place. En France l’une des agences de communication qui en a fait un produit phare est « Les têtes chercheuses ». Encore faut-il oser la mettre en place !

Une journée challengeante

La journée inversée est un jeu de rôle à ne pas prendre à la légère. Bien que ludique, cette journée n’en est pas moins une journée à challenge et pédagogique. Elle doit être encadrée pour ne pas virer au « n’importe quoi ».

Comment mettre en place la journée inversée ?

L’une des premières choses à faire si vous organiser un tel événement est de choisir une date qui conviendra le mieux à votre agenda d’entreprise. Cette journée ne doit pas être faite en plein « rush » ou en pleine livraison des derniers produits. Vous devrez également mettre en place, une dizaine de jours avant, une réunion préalable où vous préciserez les missions de la journée. C’est dans ce cadre que l’on tire les postes . Chacun devra ensuite rédiger une feuille de route pour que le successeur d’un jour ne se retrouve pas perdu. Vous serez aussi amené à conduire un débrief en fin d’expérience et recevoir les retours de chacun de vos salariés.

Autre point à ne pas négliger : si vos salariés travaillent ce jour-là en contact avec des clients, peut-être vaut-il mieux avertir ces derniers par email la veille ou l’avant-veille de façon à ce qu’ils ne soient pas surpris par le possible manque de compétence de l’employé. Sachez aussi que la formule fonctionne davantage pour des structures de 20 à 50 personnes, ainsi que dans les PME et des TPE. L’exercice est difficilement transférable pour un grand groupe sans que cela ne devienne une véritable cacophonie. De plus, si vous souhaitez instaurer dans votre entreprise une journée de ce type, la direction et les responsables doivent se prêter au jeu. Vous devez acceptez l’initiative pour vous-mêmes et en être totalement décomplexé.

Un pari risqué

Qu’on se le dise, manager une journée comme celle-ci est risquée. Tout d’abord, il faut savoir user de tact et réussir à valoriser chacun. Certains vont peut-être se trouver déborder par la tâche, se prendre au jeu à tel point qu’ils vont le croire en réalité. L’un de vos rôles sera de les rassurer quant à leurs imperfections, négligences et inaptitudes d’un jour. Pointer du doigt les médiocrités de chacun n’est pas le but. L’inverse pourrait se produire aussi : l’émergence d’un super-employé qui va faire ressortir les incapacités d’un autre. Vous devrez coordonner les tâches et user de pondération pour que chacun ne se sente ni surestimé ni sous-estimé. L’intérêt est de se mettre dans la peau d’un autre, pas d’être l’autre. Cette journée doit rester anecdotique.

Un  risque est de basculer dans le folklore voire l’absurde.

Bien sûr, une journée telle que celle-ci sera une journée de désordre et de production nulle. Mais cela ne doit pas être le carnaval des fous. A la fin de la journée, les rôles doivent se remettre en place.

« Job rotation », la variante

« Too much » diront certains d’entres vous devant tant de créativité, de prise de risque ou de gestion des équipes. Une des variantes possibles et moins décalée du « reversal day » est d’organiser une journée de « job rotation ». Cette expérience est l’occasion pour vos salariés d’être à la fois « filleul » et « parrain ». Chacun à leur tour ils découvriront le métier d’un autre ou feront découvrir le leur aux autres collaborateurs de l’entreprise.

Quel timing ?

Ce type de journée est plus commun et plus flexible puisqu’il peut s’ajuster aux différents agendas de chacun et peut se dérouler sur plusieurs journées. L’expérience peut aussi se répéter plusieurs fois dans l’année grâce à sa praticité. Pour autant, l’élaboration d’un esprit d’équipe est moins sensible à cette expérience qui ressemble davantage à un stage en immersion qu’à un jeu de rôle et d’échange.
A vous de voir et de choisir si pareille activité de communication interne vous paraît pertinente à mettre en place !

Un exemple réussi

« Vis mon travail » chez Bil Ta Garbi !

« Vis mon travail » est une opération proposée aux entreprises. Le principe est de permettre aux collaborateurs de découvrir d’autres métiers, d’autres façons de travailler, afin de mieux connaître et comprendre la réalité du travail, les contraintes, les compétences mises en œuvre par leurs collègues. L’Aract NA accompagne les entreprises dans l’organisation de cette opération.

Le Syndicat mixte pour le traitement des déchets ménagers et assimilés, Bil Ta Garbi, a proposé  aux salariés de participer  à l’opération « Vis mon travail » de répondre à une enquête de satisfaction.

Virginie Allezard, Responsable qualité sécurité environnement a présenté les résultats  d’un questionnaire proposé à la suite de l’expérience  : « La satisfaction globale est identique à celle de 2018 : 80% des participants sont très satisfaits. Les raisons avancées sont intéressantes, par exemple : avoir une vision plus globale de l’entreprise, mieux comprendre la réalité du travail des autres services, mieux appréhender les demandes des collègues, découvrir d’autres métiers, échanger et créer un esprit d’équipe. »

et elle a conclu :

 » 78% des personnes ayant participé à « Vis mon travail » ont souligné que cette action influençait dorénavant leur propre activité. »

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