L’immatriculation du preneur : condition de bénéfice du statut des baux commerciaux

La signature d’un bail commercial n’implique pas automatiquement que le preneur pourra prétendre à la protection du statut des baux commerciaux, la loi exige certaines conditions dont l’immatriculation du preneur, condition souvent négligée voire méconnue, aux risques et périls du locataire.

1. Le texte légal

L’article L.145-1 du Code de commerce précise que :

« Les dispositions du présent chapitre [c’est-à-dire celles du Chapitre V : Du bail commercial] s’appliquent aux baux des immeubles ou locaux dans lesquels un fonds est exploité, que ce fonds appartienne, soit à un commerçant ou à un industriel immatriculé au registre du commerce et des sociétés, soit à un chef d’une entreprise immatriculée au répertoire des métiers, accomplissant ou non des actes de commerce (…) ».

En d’autres termes, les dispositions relatives au statut des baux commerciaux ne s’appliquent qu’au preneur inscrit :

  • au registre du commerce et des sociétés,
  • à un répertoire des métiers.

2. Conditions de l’immatriculation

2.1 La personne à immatriculer

Il y a lieu de préciser que c’est le titulaire du bail qui doit faire l’objet de l’immatriculation.
Les locataires doivent donc être particulièrement vigilants en cas de substitution de société, de cession d’actif, d’opération de fusion-absorption, etc.

Il en résulte que la société absorbante ne pourra se prévaloir de l’immatriculation de la société absorbée. De la même façon, l’immatriculation de la société cédante ne vaudra pas pour la cessionnaire qui devra s’immatriculer dès la cession de fonds régularisée.

2.2 L’adresse à immatriculer

Il faut que les locaux objets du bail commercial soient immatriculés.

Cette condition qui peut paraître évidente est loin d’être systématiquement remplie.
A chaque fois que le siège social d’une société est différent de l’adresse d’exploitation du fonds, le preneur devra immatriculer ce fonds au titre des lieux loués.

Tous les fonds qui se trouvent exploités et qui font l’objet d’un bail commercial doivent donc être déclarés comme établissement principal ou établissement secondaire au registre ou au répertoire qui recense l’immatriculation de l’exploitant.

Il est ainsi recommandé au preneur de vérifier systématiquement que tous ses établissements sont régulièrement immatriculés, en consultant :

  • soit l’extrait K-bis (en cas d’inscription au registre du commerce et des sociétés),
  • soit l’attestation d’immatriculation (en cas d’inscription au répertoire des métiers).

3. Sanction du défaut d’immatriculation

La sanction du défaut d’immatriculation peut avoir de lourdes conséquences pour le preneur.
En effet, l’absence d’immatriculation à la date de délivrance du congé ou de la demande de renouvellement prive le locataire de son droit au renouvellement du bail et par conséquent de son droit au paiement d’une indemnité d’éviction, en cas de congé sans offre de renouvellement.

La sanction est automatique de sorte que le bailleur n’a pas l’obligation de délivrer au preneur de mise en demeure ou de commandement préalables pour l’inviter à régulariser sa situation. En outre, toute régularisation a posteriori sera sans effet.

La date qui sera retenue sera celle de la délivrance de l’acte mettant fin au bail (congé ou demande de renouvellement, délivrés par exploit d’huissier).

Par contre, si le défaut d’immatriculation constitue un motif de déchéance du droit au renouvellement et au paiement d’une indemnité d’éviction, il ne constitue pas pour autant une infraction au bail justifiant sa résiliation.

Conclusion

Toute signature d’un bail commercial doit s’accompagner de la formalité de l’immatriculation au registre compétent, au profit de la personne titulaire du bail et au titre des locaux loués. Le locataire ne saurait négliger cette formalité et s’abstenir d’en vérifier l’accomplissement, les tribunaux ayant déjà jugé qu’une erreur du greffe du Tribunal de commerce n’excusait pas le preneur pour autant et le privait malgré tout du bénéfice du statut, même si cette erreur n’était pas de son fait. On notera que l’obligation d’immatriculation imposée par la loi n’est pas d’ordre public, de sorte qu’on pourrait envisager une clause dérogatoire dans le bail qui dispenserait le preneur de cette obligation, sans le priver pour autant du droit au renouvellement.

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