Aider des start-up françaises à conquérir de nouveaux marchés et s’implanter à l’international, c’est l’objectif du French Tech Tour America, programme destiné aux start-up de l’Hexagone qui souhaitent se lancer sur le marché nord-américain. Créé en 2006 par Bpifrance (organisme français de financement et de développement des entreprises, ndlr) et Business France (structure chargée d’aider les PME et les entreprises de taille intermédiaire à se projeter à l’international, ndlr), le programme par le biais d’un appel à candidatures, sélectionne vingt entreprises, élue par un jury composé d’entrepreneurs et d’investisseurs américains et canadiens. À la clé : un programme intensif de deux semaines pour être formé à la stratégie go to market et assimiler les méthodes d’affaires du marché nord-américain. Bpifrance et Business France viennent de dévoiler le 2 juillet dernier pour le douzième édition, le nom des heureux gagnants qui s’envoleront outre-Atlantique. Douze start-up s’installeront à New York et à San Francisco tandis que les huit autres iront à Torento et Montréal. Zoom sur cinq d’entre elles.
Le marché américain et canadien attire les entrepreneurs français. 150 start-up tricolores se sont installées aux États-Unis entre 2012 et 2015 selon Pramex (cabinet de conseil en développement international du Groupe BPCE, ndlr). Entre 1800 et 2600 start-up sont actives sur l’île de Montréal, dont 170 d’origine française. En 2016, cinquante milliards de dollars ont été investis dans les start-up du pays de l’Oncle Sam contre 10 milliards d’euros en France, selon OECD (Organisation de coopération et de développement économiques, ndlr). Avec le programme de la French Tech Tour America, les entreprises françaises sélectionnées vont pourvoir accéder à ces deux marchés et peut-être s’y s’installer durablement.
Agorize, AntVoice et Caléa sélectionnées dans la promotion États-Unis
Douze entreprises s’installeront à New York et San Francisco. Parmi elles, la start-up Agorize. Créée en 2012 par Charles Thou, Yohan Attal et Yohann Melamed, elle a développé une plateforme
de challenge d’open innovation et hackathons (événements où des développeurs se réunissent pour faire de la programmation informatique collaborative, sur plusieurs jours, ndlr) réunissant étudiants, start-up et grandes marques, à travers le monde. Ce dispositif de crowdsourcing (méthode qui consiste à faire participer le grand public à la création d’un produit ou service pour bénéficier de l’intelligence du plus grand nombre, ndlr) permet aux utilisateurs de participer à des challenges organisés par les firmes. Par exemple ,WiXplore, incubateur et accélérateur créé par Schlumberger et Val d’Oise Technopole, invite les participants à proposer un projet innovant d’entreprise dans le secteur de l’énergie. En échange, des lots, des opportunités de stages, des offres d’emplois et des expérimentations de projets peuvent être proposés aux utilisateurs. La plateforme séduit puisqu’elle dispose d’une communauté de 5 millions d’innovateurs et compte plus de deux cents clients comme Carrefour, TF1, Microsoft et YouTube. Fondée en 2011 par Alban Petier et Rodolphe Mirilovic, la start-up AntVoice propose, elle, une intelligence artificielle qui permet de cibler les internautes dans leur achat en ligne avec des recommandations publicitaires personnalisées et optimisées. Plusieurs algorithmes permettent de créer un lien entre le consommateur et les mots clés qui sont visibles sur une fiche produit. Six milliards d’actions sont ainsi collectées tous les mois. De nombreuses marques et entreprises comme LCI, Garnier, L’Oréal et Priceminister ont déjà fait appel à ces services. Lancée en 2015 par Saïd Hadjiat et Olivier Lhermitte, la start-up marseillaise Caléa a créé une application de messagerie SMS. Dénommée Mood Messenger, celle-ci permet à ses utilisateurs d’accéder, sans quitter leur conversation, à de nombreux contenus et services comme réserver un restaurant ou un taxi, qu’ils peuvent ensuite partager en direct. D’autres possibilités sont proposées comme l’intégration d’émojis et de gifs animés ainsi qu’une fonctionnalité qui empêche d’envoyer des messages lorsque l’utilisateur est alcoolisé. Elle rencontre aussi un succès mondial puisque l’application est traduite dans plus d’une quarantaine de langues. Aujourd’hui, 3,5 millions de personnes utilisent cette application dont une grande partie vient des États-Unis.
Dazzl.TV et Easilys intégrées dans la promotion Canada
Huit sociétés iront à Torento et Montréal. Parmi elles, la start-up Dazzl.TV. Fondée en 2016 par Thierry Scozzesi et Laurent Cogné, elle a mis en place une application mobile de diffusion de vidéos en direct. Elle s’adresse aux journalistes, aux reporters d’images ainsi qu’aux créateurs et vidéastes professionnels, qui souhaitent mettre en valeur leurs contenus auprès des médias, marques ou acteurs de l’événementiel. Plus besoin alors de porter des équipements lourds de type studio comme des caméras qui nécessitent beaucoup d’énergie et de temps. D’autres fonctionnalités sont intégrées comme l’affichage de vidéos en mosaïque et une multidiffusion vers plusieurs plateformes et réseaux sociaux comme YouTube, Periscope ou Facebook. Une régie est intégrée dans le cloud assurant la modération des contenus et images. Une expérimentation a été réalisée en juin 2017, à l’occasion de la multidiffusion d’une représentation de l’Opéra Carmen de Bizet, à Rennes et dans 25 autres villes bretonnes. Neuf volontaires répartis dans plusieurs villes sont rentrés dans la peau d’un reporter en filmant les ambiances de la soirée. Grâce à l’application, la chaîne de télévision France 3 a pu déployer lors des journées du patrimoine en septembre 2017, une équipe réduite de trente journalistes, dont douze équipés de téléphones portables dans les différentes régions de France. Quant à la start-up Easilys, lancée en 2012 par trois frères Emmanuel, Olivier et David Grelaud, elle propose un logiciel de gestion et d’approvisionnement pour le secteur de la restauration. Avec cette solution web, qui peut être connectée aux caisses, les restaurateurs gèrent plus facilement leur établissement. La chaine d’approvisionnement, les fiches de recettes, la production et les factures de fournisseurs sont ainsi tous digitalisées. Avec le logiciel, l’entrepreneur peut alors suivre sa situation financière lui permettant de réduire ses coûts de fonctionnement. Selon la start-up, Easilys permet d’économiser entre 3 et 10% sur les coûts matières (coûts basés sur le nombre de parts d’une denrée, sur la liste complète des ingrédients et sur leurs quantités utilisées dans un plat, ndlr). Le programme est proposé au prix de soixante euros par mois et sans engagement. Easilys a su séduire de nombreux établissements comme le groupe Paul Bocuse, qui a fait son entrée dans la jeune entreprise comme actionnaire.
Les start-up sélectionnées viennent de secteurs variés, mais portent en elles, l’innovation et le recours aux nouvelles technologies. Au mois d’octobre prochain, elles s’envoleront aux États-Unis et au Canada. À l’issue du programme, elles auront trouvé des réponses aux questions primordiales liées à leur déploiement en Amérique du Nord et pourront peut-être se développer en un ou deux ans sur les marchés mondiaux de la Tech.