En feuilletant le magazine ELLE, un photographe professionnel de mode a eu la fâcheuse surprise de constater que l’une de ses photographies avait été reproduite sur des tee-shirts commercialisés par la société SANDRO. La photographie en noir et blanc représentait un portrait en gros plan d’une jeune femme blonde.
Le photographe a alors fait dresser un constat de la vente du tee-shirt sur le site internet de la société SANDRO, renvoyant lui-même au site internet des Galeries Lafayette qui proposait aussi à la vente le tee-shirt litigieux. Il a ensuite, après autorisation sur ordonnance rendue sur requête, fait procéder à une saisie-contrefaçon dans les boutiques de l’enseigne SANDRO.
Fort de ces éléments de preuves, le photographe a ensuite assigné en référé les sociétés SANDRO et GALERIES LAFAYETTE en contrefaçon de droits d’auteur. Le Tribunal de Grande Instance de Paris, par une ordonnance rendue le 12 mars 2010, donna raison au photographe, reconnaissant l’atteinte portée à ses droits patrimoniaux et moraux d’auteur et interdisant à ces sociétés la commercialisation du tee-shirt.
Ensuite assigné en contrefaçon devant le juge du fond, les sociétés SANDRO et GALERIES LAFAYETTE ont classiquement contesté le caractère original de la photographie, indiquant qu’il s’agissait là d’une « simple prise de vue en gros plan totalement banale d’un visage féminin » estimant que le demandeur avait agi en « simple technicien ». Cette défense ne devait pas prospérer, le Tribunal de Grande Instance, dans son jugement du 25 janvier 2013, reconnaissant l’originalité de la photographie.
Mais il est intéressant de relever la fin de non-recevoir qu’opposait la société GALERIES LAFAYETTE au photographe. L’existence d’une contrefaçon était contestée au motif de l’absence de justification par le photographe de l’accord du mannequin sujet de la photographie produite. En d’autres termes, le photographe était mal fondé à revendiquer un droit d’auteur sur sa photographie et partant, une contrefaçon, en l’absence de cession établie de droit à l’image du mannequin.
Pour mémoire, on rappellera que la protection par le droit d’auteur est uniquement subordonnée à la condition d’originalité dans la forme et non à l’autorisation des sujets pris pour modèle. Et si le mannequin n’avait pas autorisé le photographe à divulguer son image, seule cette dernière était en droit de s’en plaindre sur le fondement de l’article 9 du Code civil et non sur les dispositions du Code de la propriété intellectuelle.
Logiquement, dans son jugement du 25 janvier 2013, le tribunal de grande instance de Paris écarte cette fin de non-recevoir, relevant que le photographe agit uniquement sur le fondement du droit d’auteur qu’il revendique et non sur celui du droit à l’image du mannequin sujet de sa photographie.
Le photographe aurait pu également se plaindre de l’atteinte à l’image du mannequin, en plus de la contrefaçon, s’il avait été cessionnaire des droits à l’image. Mais même en l’absence d’une telle cession, le photographe reste auteur de la photographie et titulaire d’une action en contrefaçon contre tout tiers violant son monopole.