Le crédit fournisseur est bien souvent une source de financement à court terme des entreprises. Aussi subir de la part de son partenaire commercial des délais de paiement excessif fragilise l’exploitation de l’entreprise qui fournit un bien ou un service et peut engendrer de graves conséquences …
Selon Thierry Million, directeur des études chez ALTARES D&B « Réglementation, prévention mais aussi sanctions ont été essentielles pour accélérer l’encaissement des factures. Mais plus encore, c’est la prise de conscience du danger que fait peser le non-respect des délais de règlement sur le développement des entreprises qui sera la clé du changement durable des comportements de paiement. ».
Les retards de paiement des entreprises ont atteint 10,9 jours au deuxième trimestre 2017, rapporte le cabinet Altares dans une étude trimestrielle et sont enfin en diminution (13,2 jours de retard en 2016). Ils coûtent près de 16 milliards d’euros de trésorerie par an aux PME.
Le Gouvernement, dans sa détermination à agir efficacement pour réduire les délais de paiement, a souhaité renforcer l’action de la DGCCRF afin de faire respecter la loi et de lutter contre les abus de certains acteurs économiques.
Aussi, afin d’assurer une stabilité dans les rapports économiques, la loi de modernisation de l’économie (LME) du 4 aout 2008 a modifié la loi sur les Nouvelles Régulations Economique (dite NRE) du 15 mai 2001 qui avait institué un délai légal de paiement de 30 jours à compter de la date de réception des marchandises ou de l’exécution de la prestation. Ces délais ne s’appliquaient qu’à défaut (sauf aliments et transport), c’est-à-dire si les professionnels n’avaient pas fixé d’autres dispositions contractuelles.
Désormais, le régime des délais de paiement est plus restrictif puisque la loi plafonne le délai légal de paiement à 45 jours fin de mois, ou 60 jours calendaires à compter de la date d’émission de la facture. La limite de paiement intervient donc à la fin du mois civil au cours duquel expire les 45 jours (on peut également comptabiliser les délais en ajoutant 45 jours à la fin du mois de la facture en question). Toutefois, il est possible de déroger temporairement (limité au 1er janvier 2012) à ces plafonds par voie d’accords interprofessionnels validés par décret après avis du Conseil de la Concurrence. Ces mêmes délais peuvent être réduits par voie d’accords entre professionnels, ou encore varier en fonction du secteur d’activités (par exemple secteur alimentaire).
Le taux des pénalités
En cas de retard de paiement, le taux minimal d’intérêt des pénalités est porté à 3 fois le taux légal (au lieu de 1,5 fois ce taux précédemment). Sauf disposition contraire, ce taux est égal au taux d’intérêt appliqué par la Banque centrale européenne à son taux de refinancement (pour information ce taux est fixé à 1% le 27 décembre 2009) majoré de 10 points.
Le législateur et la transparence
Le législateur a également veillé à la transparence et impose désormais, sous peine de sanctions pénales, que les mentions suivantes soient indiquées sur la facture : date calendaire à laquelle le règlement doit intervenir, les conditions d’escompte, etc.…
Outre les poursuites par l’autorité de la concurrence en raison d’un comportement anticoncurrentiel, des dommages et intérêts peuvent être prononcés par les juridictions de droit commun en cas d’application de délais de paiement discriminatoires.
A l’inverse, en cas de défaut de paiement dans les délais, le taux d’intérêt s’applique de plein droit sous réserve de mention dans les factures ou les conditions générales de vente.
Que doit faire le créancier ?
Afin de contraindre le débiteur à honorer ses engagements, le créancier n’aura pas d’autres choix que de l’assigner devant le Tribunal aux fins de le voir condamner au paiement des sommes dues. En fonction de la nature et du quantum de la créance, la juridiction civile ou commerciale, statuant éventuellement en référé, sera compétente.
Le créancier peut également saisir la juridiction (civile ou commerciale) d’une requête en injonction de payer. Cette procédure rapide n’est pas contradictoire (le débiteur n’est pas convoqué pour s’expliquer), en sorte qu’il dispose d’un délai d’1 mois à compter de son information pour contester l’ordonnance d’injonction, par voie d’opposition, auprès du tribunal qui l’a rendue. Cette opposition saisie le Tribunal du litige lequel statuera sur la créance principale et les intérêts de retard consécutifs au non-paiement dans les délais….
Article par Philippe RUFF – Avocat à la Cour