Interview de Philippe Lukacs, président de Catalyser et auteur de « Stratégie pour un futur souhaitable, quatre créations exemplaires pour un management innovant »
Quelles sont les problématiques que rencontrent les créateurs d’entreprises innovantes ?
Créer une entreprise innovante représente ainsi un véritable casse-tête !
- Vous devez être capable de démarrer votre innovation avec très peu d’argent. En effet, si le champ des possibilités s’étend de plus en plus, les incertitudes elles aussi croissent. Le risque étant considérable, le créateur d’entreprise innovante doit savoir commencer avec des sommes limitées.
- Vous devez apprendre à avancer malgré l’incertitude. Dans une entreprise de type classique, la demande peut être analysée et quantifiée grâce à des études de marché qui vous indiquent la fiabilité de votre projet. L’entrepreneur peut alors avancer en ayant minimisé le risque. Mais maintenant, puisque l’offre crée la demande, il ne peut, à l’inverse, pas bénéficier d’une réelle étude de marché. Dans ce cas là, le secret est de se constituer un réseau social de personnes à qui vous ferez tester votre produit.
- Vous êtes devant l’obligation de ne pas vous focaliser uniquement sur le produit. Il faut avoir un regard très large et apprendre à imaginer, au-delà de son propre produit, la palette des autres produits et services dans lesquels votre produit s’insérera pour offrir une offre globale.
- Vous avez la nécessité de gérer le temps avec une grande précision. Le produit innovant ne peut s’imposer que s’il arrive sur le marché au bon moment, ni trop tôt, ni trop tard. La fenêtre de tir est très courte !
- Vous devez enfin avoir la capacité de créer une dynamique collective autour de votre produit. Il va vous falloir travailler rapidement à créer un marché et à modifier le mode de fonctionnement des clients pour stimuler la demande.
Comment percevoir la bonne période pour arriver sur le marché ?
Vous devez vous appuyer sur tout sauf sur l’intuition ! Je pense que le créateur d’entreprise innovante doit se doter d’un axe stable et dynamisant s’il ne veut pas se faire piéger par les difficultés que je viens de citer.
Cet axe dont je parle n’est autre que la vision de ce que je nomme un « futur souhaitable ».
Je m’explique : Puisque, aujourd’hui l’entreprise crée la demande, crée le marché, crée le futur, sa responsabilité face à l’avenir est particulièrement grande : celle de favoriser le développement économique bien sûr, mais également le développement social et environnemental. L’innovation se doit de créer un futur souhaitable, qui intègre la notion de développement durable et poursuit l’objectif de favoriser des relations positives entre l’humain et l’ensemble de son environnement.
Mais concrètement, est-ce possible d’être rentable à court terme en pariant sur le développement d’un futur souhaitable ?
Aujourd’hui, le monde doit faire face à une situation de crise, aussi bien au niveau économique que social ou environnemental, dont la cause réside justement dans le manque d’attention qui a été porté au développement d’un futur souhaitable. Il y a de multiples exemples d’entreprises innovantes reconnues comme fortement porteuses de futur souhaitable et qui représentent des succès économiques avérés.
Prenez l’entreprise Max Havelaar par exemple ou le micro-crédit. Ces projets qui semblaient au départ irréalisables et qui sont maintenant des succès exemplaires montrent qu’il est possible de réussir des innovations qui contribuent à un futur souhaitable, maintenant, même dans un environnement difficile.
Pourquoi les entreprises doivent-elles innover ?
Les évolutions technologiques sont constantes, de plus en plus rapides : la puissance de l’électronique double tous les dix-huit mois (loi de Moore) et l’électronique est la mère de toutes les technologies. Ceci oblige toute l’organisation qui l’entoure à se modifier parallèlement.
Si la technologie n’évoluait pas sans cesse, il n’y aurait nul besoin d’innover, sur le produit, ou plus largement au niveau de l’organisation. Cependant, si la technologie évolue rapidement, changer de mode de fonctionnement dans l’entreprise tous les dix-huit mois serait une absurdité. On entrevoit ainsi la nécessité mais aussi la difficulté de l’innovation : elle est poussée par la vitesse de l’évolution de la technologie, mais doit tenir compte des pesanteurs organisationnelles, éducatives, culturelles.
Innover est le seul moyen pour les entreprises d’attirer la clientèle aujourd’hui ?
Oui, mais, avec une relation au client tout à fait nouvelle. En effet, du fait de l’accélération exponentielle de l’évolution technologique, l’offre potentielle évolue maintenant très rapidement.
Mais, comme on l’a dit plus haut, chacun peut constater aussi qu’on ne peut réduire par deux le temps nécessaire à un changement organisationnel tous les dix-huit mois, on ne peut doubler l’efficacité de l’éducation tous les dix-huit mois.
Ainsi, alors que la demande a longtemps pu guider l’offre, l’offre potentielle précède maintenant la demande. L’innovation est en avance de phase par rapport à la demande, dans une dynamique où l’offre est, comme on dit, « créatrice » de la demande. Il s’agit là d’une situation tout à fait nouvelle, beaucoup plus délicate.
Catalyser en quelques mots
Catalyser appuie les créateurs dans leur démarche d’innovation. Elle se met au service des porteurs de projets d’entreprises innovantes à fort potentiel ainsi qu’aux responsables d’entreprises qui ont compris l’intérêt de mettre en place des innovations porteuses de futur. L’innovation, telle qu’elle est conçue par Catalyser, n’est pas seulement d’ordre technologique et elle vise à contribuer à un futur souhaitable.
L’innovation, c’est ?
Elle peut porter sur un nouveau produit, un nouveau service, un nouveau mode de distribution, un nouveau Business Model, une nouvelle façon de fonctionner, mais aussi une nouvelle façon de produire et de s’organiser au sein de l’entreprise. L’innovation peut porter sur des domaines très variés.