Les publicités nous promettent un teint parfait, un bien-être incomparable et une foule de bienfaits avec un seul yaourt. L’image d’aliment-cosmétique serait-elle gagnante pour les marques ? La cosmétofood, nutricosmétique ou encore la dermonutrition permettraient de manger bon pour les papilles et la santé. Le concept fait rêver, mais est-il bon d’investir dans ce secteur très en vogue au Japon mais qui laisse encore des sceptiques en France ?
Cosmétofood, nutricosmétique et dermonutrition : des promesses séduisantes
« Il fait du bien à l’intérieur, et ça se voit à l’extérieur » affirme-t-on dans les publicités « Activia » de Danone. Une quantité de marques mettent en avant cette image d’aliment-cosmétique, mais ces produits ne touchent pas forcément les consommateurs de la façon escomptée. La nutricosmétique, aussi appelée cosmétofood, se situe entre la nourriture healthy, orientée vers les produits sains et naturels, et la nourriture médicale, aux vertus thérapeutiques réelles. La dermonutrition, quant à elle, désigne un mode d’alimentation aux effets bénéfiques pour la peau.
Ces mouvances nouvelles suscitent la curiosité et même si le public français semble garder quelques réserves, de plus en plus de marques investissent dans cette combinaison nourriture/bien-être.
Quelques exemples de marques
A titre d’exemple, la publicité de la firme Yoplait pour son yaourt « Perle de lait » montre une jeune femme s’appliquant du yaourt sur le visage à la manière d’une crème hydratante. La gamme « Activia » de Danone, dont le succès reste mitigé en France, base toute sa communication sur les bienfaits qui feraient rayonner les consommatrices de l’intérieur.
Le géant suisse Nestlé a également fait de la dermonutrition son cheval de bataille. En 2002, la firme s’associe avec L’Oréal, dont elle rachète la moitié des parts du laboratoire Galderma avec la ferme intention de devenir leader mondial en matière de santé de la peau, des cheveux et des ongles. Elle a pour cela mis au point une large gamme de produits innovants et scientifiquement prouvés, tentative qui s’est soldée par un échec. Ce domaine en pleine expansion peut sembler alléchant pour tout entrepreneur mais il faut, comme on vient de le voir, rester prudent.
Zoom sur les entreprises du secteur
La cosmétofood et la dermonutrition, de par leur aspect innovant, attirent beaucoup d’entrepreneurs, dont des géants de l’industrie agroalimentaire. Parmi les plus célèbres noms de la nutricosmétique et de la dermonutrition, Oenobiol, Biocyte, Imedeen ou Rejuvenal, proposent des compléments alimentaires et des cosmétiques naturels. Rachetée au laboratoire français Sanofi par le Hollandais Vemedia en 2016, Oenobiol conçoit des produits entièrement bios et générait l’année dernière 57,2 millions d’euros de chiffre d’affaires. Un résultat qui incite d’autres entreprises à se pencher sur ce secteur.
Après avoir acheté 50% des parts du laboratoire Galderma à son associé de longue date, L’Oréal, Nestlé a continué dans la nutricosmétique. La firme s’est agrandie avec une branche médicale en 2014 : la filiale Nestlé Skin Health, dédiée aux soins médicaux de la peau. L’entreprise française Biocyte, quant à elle, a généré 9,5 millions d’euros l’an passé. Des chiffres qui peuvent donner envie d’investir du temps et de l’argent, mais la cosmétofood est loin d’avoir convaincu tout le monde. Si les Japonais plébiscitent ce concept, les Français sont plus réservés et quelques échecs et mauvais échos laissent place à l’hésitation.
Les inconvénients et flops de la cosmétofood
En 2010, un article paru sur le site marketingprofessionel.fr prévoyait la mort imminente de la cosmétofood. Ce scénario radical ne s’est pas produit mais les marques ont commis plusieurs erreurs et certaines leur ont coûté cher. L’article insiste notamment sur la réserve des nutritionnistes sur la nutricosmétique et rappelle que ce type d’alimentation ne peut se substituer à un mode de vie sain. Ceci dit, une bonne partie de la population française a suivi le mouvement et s’est senti déboussolée quand des firmes ont commis certains écarts.
En 2007, par exemple, Danone lance un nouveau yaourt, « Essensis », dont la campagne publicitaire vante les vertus détoxifiantes pour la peau. Non seulement la firme se trompe de cible, mais, en plus de cela, elle déçoit les consommatrices qui ne voient rien de plus qu’un yaourt trop gras et sucré. Autrement dit, en contradiction avec le concept même de cosmétofood. Si cet exemple demeure un cas d’école, il en existe bien d’autres, mais le prix très élevé a aussi beaucoup contribué à freiner les acheteurs potentiels : le litre de jus « Tropicana Essentials Antioxydants » frise les trois euros, 100 grammes de thé « Belle Peau » de Fauchon coûtent 22 euros…
De quoi refroidir les consommateurs. Au-delà du prix et des erreurs de jugement, l’exemple d’Innéov Nutricosmetics, fruit de l’association Nestlé-L’Oréal, pousse à la réflexion : le laboratoire a fermé au bout de dix ans d’activité à cause d’une législation trop restrictive qui l’empêchait de vendre certains produits en Europe.
La communication : l’élément clé du succès de la dermonutrition
Le recours à l’image de stars internationales comme Shakira pour « Activia » et le packaging léché de ces produits leur garantit un minimum d’attention de la part des consommateurs. Destinés à rendre la peau plus belle, les contenants se doivent d’être à la hauteur des contenus, épurés et naturels tout en restant étincelants. La marque de boissons Tao, elle, joue sur un design de feuilles pour évoquer la composition saine de ses produits. Les bouteilles d’eau minérale ou même les pots de yaourt Taillefine évoquent, de par leur forme, une silhouette mince et élancée, soutenues par des phrases d’accroche allant dans ce sens. La cosmétofood s’appuie sur une combinaison savante de packaging sophistiqué et sur un message simple de retour à la nature.
Malgré ces quelques erreurs, le secteur des nutricosmétiques et de la dermonutrition se porte très bien. La question qui reste éventuellement en suspens concerne le long terme, aux vues des échecs du laboratoire Galderma, et les réserves, voire rejets, des nutritionnistes.