Lancé le 18 janvier dernier par le SFIC (Syndicat français de l’industrie cimentière, ndlr), le « Cement Lab » a pour vocation de créer des liens entre start-up, sociétés du secteur de la construction et des BTP, mais aussi du monde de la recherche académique. Ce laboratoire d’idées spécialisé dans le ciment et son utilisation cherche à promouvoir et réunir les talents innovants. Objectif : comprendre et prendre en main les transformations du marché, qui est bouleversé par les nouvelles technologies, par l’émergence du développement durable et des modes novateurs de production énergétiques. Pour faciliter les échanges, deux workshops (ateliers collaboratifs, ndlr) sont organisés dans l’année. Le premier événement s’est déroulé le 4 juillet dernier à La Station F, campus de start-up créé par Xavier Niel. Huit entreprises ont eu la possibilité de mettre en avant leur projet. En voici quelques-unes.
Le marché du ciment dans l’Hexagone générait un chiffre d’affaires d’environ 2,4 milliards d’euros en 2015, selon le Syndicat français de l’industrie cimentière. Environ 15,9 millions de tonnes de ciment ont été produites en 2016. Le secteur cimentier emploie aujourd’hui près de 5000 personnes. L’ensemble de la filière béton représente plus de 55 000 emplois et génère 350 000 emplois directs et indirects selon Infociments (plateforme d’information de l’industrie cimentière française, ndlr). Pour adapter l’offre, répondre aux nouveaux besoins des clients et faire évoluer les pratiques, le « Cement Lab » met en lumière des start-up en mesure de moderniser ce marché.
EtNisi : transformer les déchets en matériaux de parement
Crée en 2017 par un ingénieur, Espérance Fenzy, la start-up EtNisi propose de concevoir des objets à partir de matériaux recyclés. Verre, marc de café, coquilles de moules, balles de tennis ou encore du béton. Plus de quatre cents déchets ont été testés. Autant de produits qui sont transformés pour devenir des matériaux de parement. Le but : créer des matières formées au minimum de 80 % d’éléments recyclés. Les produits qu’il fabrique par son procédé, où le déchet est jeté dans un liant (produit chimique servant à agglomérer en masse solide des particules solides sous forme de poudre ou de granulats, ndlr), le dirigeant la dénommé « Wasterial ». Par la suite, différents objets sont ainsi modelés comme des tabourets fabriqués à partir de café, des carrelages, des pavés et des dalles extérieures aux couleurs atypiques fabriqués à partir de sable ou de calcaire.
La toute première usine se situe à Roubaix tandis que le showroom, qui permet découvrir les produits de l’entreprise se trouve à Marcq-en-Barœul. Leurs premiers clients étaient des architectes de l’usine de Fives-Cail en reconstruction où la société a créé de la faïence pour la cuisine avec des matériaux récupérés sur le chantier. Le Syndicat Français de l’Industrie Cimentière a indiqué que quarante projets sont en cours d’étude pour la réutilisation de béton dont le projet de reconversion d’un ancien bâtiment des 3 Suisses en logements, à Roubaix. D’ici 2020, Espérance Fenzy souhaite réaliser cinq millions de chiffre d’affaires afin de pouvoir ouvrir cinq à six unités de production transportables afin de disposer de toutes les matières nécessaires. Pour développer l’entreprise, il a lancé une campagne de crowdfunding sur le site Popcity. Plus de 5460 euros ont été récoltés, pour un objectif attendu de 5000 euros.
Basilisk et sa solution de béton auto-cicatrisant
Fondée par Bart van der Woerd en 2015, la start-up Basilisk a créé et breveté, en collaboration avec l’Université de technologie de Delft aux Pays-Bas et le Dr Henk Jonkers, microbiologiste spécialiste du comportement bactérien, un additif auto-cicatrisant pour le béton. Celui-contient des bactéries spécifiques qui commencent à produire du calcaire, au contact de l’air et de l’eau, créant un système de réparation autonome qui ferme les fissures dans le béton. Les brèches jusqu’à 0,8 mm de largeur peuvent être traitées et colmatées. Le produit permet ainsi d’augmenter la durabilité et la durée de vie des structures, tout en réduisant les coûts d’entretien, les réparations et les interruptions des travaux. Il a également la capacité de réduire considérablement l’empreinte carbone (quantité de carbone émise par la consommation d’énergie et de matières premières d’une activité, ndlr) du secteur qui représente aujourd’hui 5 % des émissions mondiales de CO2. Des expérimentations ont été réalisées entre 2015 et 2016, sur Groninger Forum, bâtiment dans le centre-ville de Groningen et un parking de 12 000 m² de la commune de Apeldoorn. Elles ont été couronnées de succès et l’entreprise est présente aujourd’hui en Allemagne, en Belgique, au Royaume-Uni, au Japon, en Corée du Sud, en Chine et en Inde. Le dirigeant souhaite investir massivement en Asie, puisque 70 % de la consommation mondiale de béton y est concentrée.
Dataswati et son assistant intelligent au service des processus de production
Lancée en 2016 par Aurélien Verleyen et Amine Benhenni, la start-up offre une intelligence artificielle dénommée « PowerOP » qui vient en aide aux entreprises afin d’améliorer l’efficacité de leurs processus de production comme la productivité et la consommation d’énergie. En servant des données dites structurées comme des automates et des capteurs, le programme va réduire les déchets rigoureusement, utiliser agilement la matière première et réduire la facture énergétique de l’entreprise. Il peut être employé dans les industries chimique et pharmaceutique ainsi que dans l’agriculture. Dans le cas de l’industrie cimentière, la solution sera capable de prévoir la qualité d’un ciment en production vingt-huit jours avant sa sortie de l’usine, en effectuant des analyses instantanées toutes les heures.
L’industrie cimentière tricolore avec le « Cement Lab » cherche donc à évoluer en faisant appel aux start-up. Début juillet, la WCA (World Cement Association, l’Association mondiale du ciment en français, ndlr) a lancé un appel au marché international du ciment afin de renforcer ses efforts pour mettre en place des nouvelles technologies et favoriser l’innovation. L’objectif est de combattre le réchauffement climatique, en diminuant les émissions de CO2.