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Le business de l’ADN, un marché en plein boom

Le business de l'ADN

Le test ADN qui permet d’en savoir plus sur les origines de ses ancêtres et sur son patrimoine génétique est en vogue aujourd’hui. Il s’accompagne également d’autres promesses comme connaître les risques de développer une maladie grave ou héréditaire. D’abord pratiquer uniquement dans des laboratoires pharmaceutiques ou de recherche, il se démocratise auprès de la population. Des entreprises et des start-up en profitent pour se lancer dans ce marché juteux des tests génétiques en utilisant les procédés actuels de communication. Des vidéos publicitaires sur les réseaux sociaux comme Instagram ou YouTube se multiplient où des personnes sont mises en scène en train de découvrir leurs ancêtres. Zoom sur ce business qui cartonne, mais qui fait l’objet de nombreux débats.

L’idée de réaliser un test ADN trotte dans la tête de nombreux Français pour découvrir leurs ancêtres et leur patrimoine génétique, mais également du côté des généalogistes, pour faciliter leurs recherches. Près de 56% des Français souhaiteraient réaliser un test ADN, selon un sondage réalisé en mai dernier par Généanet (site internet tricolore de généalogie proposant une base de données alimentée par les participants et à destination du grand public, ndlr), sur un panel de 20 000 utilisateurs.

La Génération Y, qui regroupe l’ensemble des personnes nées entre 1980 et 2000 est celle qui souhaite le plus se lancer dans ce genre de procédé, soit plus de 85 %. Reste que neuf interrogés sur dix souhaitent que ces tests soient réalisés par une entreprise issue de l’Europe et qu’ils soient contrôlés sous le régime du RGPD (Règlement général sur la protection des données, ndlr).

Pour plus de 40 % de généalogistes, ces analyses génétiques sont nécessaires pour obtenir des données cartographiques sur les migrations des populations. Sur l’ensemble des personnes sondées, deux sur trois sont d’accord avec l’idée d’autoriser cette pratique dans l’Hexagone si elle est encadrée, dont plus de 86 % chez les moins de 25 ans. Tour d’horizon de ce business qui séduit dans le monde.

Un business florissant

Payer cent jusqu’à plusieurs milliers de dollars ou d’euros pour recevoir un kit de prélèvement, avec deux cotons-tiges et un mode d’emploi pour ensuite le renvoyer afin de connaître ses ancêtres et son patrimoine génétiques. De plus en plus de personnes dans le monde le font. C’est notamment grâce à l’effondrement inimaginable du coût du séquençage.

Là où il y a une décennie, cela coûté plus de 100 millions de dollars, aujourd’hui tout a chacun peut décrypter un génome humain pour moins de 1000 dollars. Rien qu’en 2014, le marché des tests génétiques pesait déjà 20 milliards de dollars. Il devrait être estimé à 25 milliards de dollars par an à l’horizon 2021. Véritable engouement aux États-Unis, ce seraient plus de 1,5 million de personnes qui auraient, lors du dernier Black Friday, commandé un test auprès de la société AncestryDNA. 12 millions d’Américains y ont eu recours en 2017, selon le journal Le Monde.

Des sociétés multiples aux États-Unis et en Europe

Le pays de l’Oncle Sam est en effet, la terre d’élection de ce type d’activité. Les sociétés de tests génétiques se sont multipliées mettant en avant des entreprises comme 23andMe. Elle est la pionnière dans ce secteur où elle propose des tests d’ADN à domicile, à partir de 99 $. Les clients doivent juste envoyer un échantillon de leur salive et reçoivent alors des informations sur leur ascendance ainsi que des précisions relatives à leur santé, comme le risque de cancer. Des pratiques qui ne sont pas à l’abri de quelques dérives et polémiques, menaçant les données des utilisateurs.

En août dernier, la firme a conclu un accord à 300 millions de dollars avec l’industriel pharmaceutique GlaxoSmithKline en cédant la majorité des données génétiques de ses 5 millions de clients. Du côté  de l’entreprise MyHeritage basée en Israël, les données particulièrement sensibles de 92 millions de leurs clients ont été piratées en juin 2018. En Belgique et en Suisse, les start-up Gene Plaza et iGENEA proposent également la même solution que les entreprises précédentes citées. Deux services peuvent être offerts pour que le client puisse accéder à des applications génétiques en important des données ADN réalisés par d’autres entreprises ou commandant un kit de test.

Des pratiques encadrées, voire interdites en France

Aucune entreprise française ne propose ce type de service. Pour sécuriser les données génétiques, l’État a mis en place un encadrement strict régi par le Code civil et le code de la santé publique, depuis la loi de bioéthique de 2004. Les examens ADN ne peuvent être réalisés qu’à des fins médicales, scientifiques et judiciaires. Au cas où des personnes décideraient de faire réaliser ou de réaliser elles-mêmes des tests, elles seraient punies très lourdement à 3 750 euros d’amende pour ceux qui en ont demandé et en cas de peine maximale, à un an de prison et 15.000 euros d’amende pour celles qui en réalisent.

Des punitions qui ne semblent pourtant pas effrayer les Français. Rien n’interdit à ceux-ci de pratiquer des tests ADN à l’étranger, ce qui explique le monopole des entreprises américaines sur ce marché. Malgré la loi, 100 000 d’entre eux auraient déjà réalisé un test selon Guillaume de Morant, journaliste, généalogiste et auteur d’un ouvrage sur l’ADN intitulé « Retrouver ses ancêtres par l’ADN ». Des forums de généalogie comme sur le site Geneanet démontrent que les Français sont de plus en plus nombreux à réaliser leur test auprès d’entreprises étrangères.

Si le business de l’ADN cartonne, deux camps de médecins et experts s’affrontent. Les uns considèrent que ce sont des méthodes scientifiques fiables tandis que les autres restent dubitatifs face à ce genre de procédé notamment autour des tests pour connaître ses origines.  Marie Besse, professeur d’archéologie préhistorique et anthropologie à l’université de Genève déclare que ces tests ne sont qu’une projection et en aucun cas, une vision de la réalité, l’origine d’une personne ne pouvant être définie sur le seul socle de l’analyse ADN. Du point de vue éthique, les certains médecins sont également inquiets face à ce business, notamment le docteur Sophie Julia, généticienne au CHU de Toulouse, soulignant le manque de transparence des entreprises, qui n’indiquent pas comment les séquences ADN sont analysées et utilisées, ce qui remet en question la valeur réelle des tests.

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