Bootstrapping vs levée de fonds : Pourquoi certaines startups réussissent mieux sans investisseurs ?

La manière de se financer est une question pour toute startup. Si la levée de fonds est souvent perçue comme un passage obligé pour réussir, de plus en plus d’entrepreneurs choisissent une autre voie : le bootstrapping. Cette approche consiste à financer son entreprise avec ses propres moyens, en réinvestissant les revenus générés au lieu de dépendre d’investisseurs extérieurs. Moins spectaculaire que les levées de millions d’euros, le bootstrapping offre pourtant des avantages considérables : indépendance totale, contrôle stratégique et meilleure rentabilité à long terme. 

L’indépendance, un atout décisif

Lever des fonds permet certes d’accélérer la croissance, mais cela implique aussi de céder une part de son entreprise et de partager le pouvoir décisionnel avec des investisseurs. À l’inverse, les startups qui se développent en bootstrapping conservent un contrôle total sur leur stratégie, leur vision et leurs choix opérationnels.

Mailjet, acteur français de l’emailing, est un parfait exemple de startup qui a réussi à grandir sans dépendre de financements extérieurs au départ. Grâce à une approche basée sur la rentabilité immédiate et une forte optimisation des coûts, l’entreprise a su se développer et se positionner sur le marché en se finançant avec son propre chiffre d’affaires avant d’être rachetée par Mailgun.

Cette indépendance permet aux fondateurs d’éviter la pression des investisseurs, souvent focalisés sur une croissance rapide et sur des objectifs à court terme. En bootstrapping, les entrepreneurs gardent la maîtrise du rythme de développement et privilégient la pérennité de leur activité plutôt qu’une expansion accélérée.

Une discipline financière qui renforce la solidité de l’entreprise

Les startups qui lèvent des fonds disposent souvent de capitaux abondants, ce qui peut conduire à des dépenses excessives et une structuration inefficace de l’entreprise. En bootstrapping, chaque euro compte, ce qui oblige à une gestion rigoureuse des ressources et à une optimisation constante des coûts.

Shine, la néo-banque française destinée aux indépendants, a longtemps fonctionné en autofinancement avant d’être rachetée par Société Générale. En provoquant les levées de fonds précoces, l’entreprise a pu se concentrer sur son produit et son marché sans diluer son capital. Cette approche lui a permis d’atteindre la rentabilité rapidement et de négocier sa vente en position de force.

Les startups en bootstrapping adoptent souvent un modèle économique viable dès le départ, en cherchant rapidement à monétiser leur produit ou service. À l’inverse, de nombreuses startups financées par des levées de fonds brûlent des millions sans générer de revenus significatifs, espérant atteindre la rentabilité bien plus tard – parfois trop tard.

L’agilité et la liberté de pivoter sans contrainte

Lever des fonds implique souvent de répondre aux attentes des investisseurs, ce qui peut limiter la capacité d’une startup à pivoter si son modèle initial ne fonctionne pas. Une entreprise autofinancée, en revanche, peut ajuster sa stratégie à tout moment, en fonction des retours clients et des opportunités de marché.

Un exemple parlant est celui de PayFit, startup française qui simplifie la gestion de la paie pour les entreprises. Avant d’accepter des financements, ses fondateurs ont testé différents modèles et affiné leur produit jusqu’à atteindre une traction suffisante. Cette approche leur a permis de lever des fonds ensuite, mais avec une base solide et un produit déjà validé.

Une approche plus humaine et durable

Le bootstrapping favorise souvent une culture d’entreprise plus saine et équilibrée. Plutôt que de viser une hypercroissance à tout prix, ces startups misent sur un développement progressif et maîtrisé, qui respecte le bien-être des équipes et la qualité du produit. Il faut dire que le financement externe pousse souvent à une croissance ultra-rapide, avec une multiplication des recrutements et des objectifs ambitieux. Si ce modèle peut fonctionner, il conduit aussi à des cas de surchauffe, où l’entreprise brûle trop de cash et se retrouve dans une impasse financière en quelques années.

Des entreprises comme Lunii, qui produisent des conteurs audios pour enfants, ont choisi de grandir sans levée de fonds massif, en privilégié une croissance organique et un modèle basé sur la satisfaction client plutôt que sur la performance financière immédiate. Cette approche leur a permis de conserver leur ADN et de créer une entreprise rentable et durable.

Bootstrapping vs levée de fonds : quel modèle choisir ?

Le bootstrapping et la levée de fonds sont deux stratégies aux implications très différentes. Tout dépend des ambitions, du secteur d’activité et du modèle économique de l’entreprise.

  • Lever des fonds est pertinent pour des startups à forte intensité capitalistique, qui nécessitent des investissements lourds pour se développer (deeptech, biotech, industrie…). C’est également une bonne option pour ceux qui veulent conquérir rapidement un marché et devenir des leaders avant leurs concurrents.
  • Le bootstrapping , en revanche, est idéal pour les entreprises de services, les logiciels SaaS, les e-commerces ou tout modèle qui peut générer des revenus dès le départ sans nécessiter d’investissement massif.

De nombreux entrepreneurs choisissent aujourd’hui une voie hybride : ils démarrent en bootstrapping pour valider leur marché et atteindre une certaine rentabilité, avant de lever des fonds pour accélérer leur croissance une fois leur business model éprouvé. Cette stratégie permet de conserver un maximum d’indépendance tout en bénéficiant d’un financement externe lorsque cela devient réellement nécessaire.

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